Les délires d'Akakia

dimanche, juillet 22, 2007

À mots perdus, pour le plaisir de dire, de dédire et d'écrire...

L'orpailleur

Je suis écrivain ! Comme un grand manteau, l'écriture couvre ma vie. Ce qui veut dire que j'exprime ma pensée et assume mon unicité avec des mots que je marie par mes sueurs à du papier. À partir de ce point de passage, ma vie personnelle ne devrait plus avoir d'importance. C'est mon oeuvre, et mon oeuvre littéraire seule qui doit retenir l'attention.

Je suis écrivain ! Ce qui veut dire aussi que j'écris beaucoup, sans trop réfléchir, sans compter les heures. Il faut écrire quand on est écrivain. Écrire pour exprimer plutôt que pour dire. Écrire tout le temps, sans jamais s'arrêter. Car les mots qui se perdent dans la nuit de l'Éternité pour n'avoir pas été écrits, sont des rendez-vous manqués qui ne reviendront jamais. Ni par notre plume, ni par celle des autres qui, depuis Sumer, tissent inlassablement le suaire du temps de l'humanité.

Je suis écrivain ! Ce qui veut dire encore que, comme le chercheur d'or remuant la montagne de gravats avec sa batée pour y cueillir les quelques pépites qu'elle recèle, il me faut laver les mots, les laver sans jamais me lasser. Il me faut percer la montagne que la vie a placée devant moi. Percer sans espoir de retour, sans jamais me soucier des orpailleurs qui feront le tri de mes labeurs, rejetant beaucoup de ceci et, au mieux, ne retenant qu'un peu de cela. Tâcher de réinventer le mot qui sait émouvoir dans la phrase bien roulée au détour d'une lassitude, voilà le salaire de l'écrivain et du poète qu'il abrite.

Akakia
22 juillet 2007

mardi, juillet 17, 2007

De l'affaire « Fortier – Alcan – Approche commune » / La Suite...

L'affaire « Fortier-Alcan-Approche commune », ce débat soulevé ces jours-derniers dans « Les Délires d'Akakia » n'aura pas été inutile. En effet, dans son édition de ce mardi 17 juillet de l'an de grâce 2007 le journal Le Quotidien du Saguenay–Lac-Saint-Jean fait amende honorable. Il publie l'information à l'effet que M. Yves Fortier, négociateur en chef du gouvernement du Québec dans les pourparlers en vue du traité titré « Approche commune », soit également président du conseil d'administration de la multinationale Alcan (et président du cabinet Ogilvy Renault cela doit également être précisé). Dans un éditorial qu'il faut saluer avec convenance, l'éditorialiste Carol Néron pose enfin la question qu'on aurait dû poser sitôt l'annonce faite de sa nomination voilà déjà 17 mois : « Est-ce que les deux fonctions entrent en conflit ? Le gouvernement Québécois aura sans doute à répondre à cette question afin de rassurer la population. » Fin de la citation.

Pour ceux qui ne sont pas familiers avec le débat, prenons le temps de rappeler que le 20 février 2006, dans un communiqué officiel, l'honorable Jim Prentice, alors ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien et Interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, se disait « réjouit des nominations de M. Carl Nepton au poste de négociateur en chef des Innus du Conseil tribal Mamuitun mak Nutashkuan et de M. Yves Fortier à titre de négociateur en chef du gouvernement du Québec, dans le cadre des revendications territoriales globales et d’autonomie gouvernementale des Innus du Québec. »

Éblouis par le CV bien rempli de M. Fortier, les journaux du pays s'étaient ainsi donc passé le briquet de main à main pour mettre le feu dans l'encensoir du réputé avocat. Parce qu'il avait été nommé « Advocatus Emeritus par le Barreau du Québec », ce qui est loin du plancher des vaches ; parce qu'il partageait son temps entre l'ONU et les parquets boursiers, ce qui est tout à fait honorable en soi ; parce qu'il oeuvrait au sein de la réputé maison d'avocats Ogilvy Renault, ce qui à leurs yeux était un gage d'excellence et une réussite assurée ; pour ceci et pour cela, les maîtres chantres des médias du pays, de la province et de la région ressource n'avaient ainsi donc pas cru bon ouvrir une parenthèse pour questionner le fait que M. Fortier, québécois émérite, était également président du C.A. de l'Alcan, soit dit en passant propriétaire de 95% des forces hydrauliques et hydro-électriques du Saguenay–Lac-Saint-Jean, et, par voie de conséquences, première intéressée dans les conséquences pécuniaires du traité. On aura intérêt à se rappeler également à cet égard, que la nomination de M. L. Yves Fortier en remplacement de M. Louis Bernard, Péquiste émérite et jusqu'alors grand chaman des négociations de l'Approche commune pour le gouvernement du Québec, avait été claironnée comme le meilleur choix possible compte tenu du parcours professionnel de M. Fortier, qui était alors et par défaut le second choix de Jean Charest, en succédané à Lucien Bouchard, ex-premier ministre du Québec et, à ce titre, sanctifié de son vivant.

À l'époque, dis-je bien, la nomination de l'avocat Fortier, était devenue pour les médias « le secret le moins bien gardé en ville » (cf. Le Quotidien, 17 février 2006, p. 10) ... mais pas pour le public qui lui, le cocu content de l'histoire, aurait bien aimé savoir ! Elle avait été annoncée comme la sortie des premières fraises de l'Île d'Orléans, sachant fort bien qu'il suffirait d'une petite nuit fraîche pour en dissiper les couleurs et les odeurs dans la mémoire citoyenne. À l'époque, je dis bien : nul journal, nul journaliste, nul éditorialiste n'avait effectivement pris le temps de noter les liens professionnels et d'affaires conflictuels unissant l'avocat Fortier —doublement président de la firme Ogilvy Renault et de la multinationale Alcan– au controversé dossier de l'Approche commune. Un dossier où, soit dit en passant, les intérêts supérieurs des citoyens du Saguenay–Lac-Saint-Jean–Côte-Nord et des Métis de la Boréalie sont directement menacés pour les siècles et les siècles et jusqu'à ce que mort s'ensuive.

Akakia

dimanche, juillet 15, 2007

L'Alcan, maître d'oeuvre du controversé traité avec les Ilnutsh (L'Approche commune) et maître absolu en nos Parlements !

C'est chose faite ! Après une vérification très serrée, finale et affirmative dans l'absolu ; il faut prendre comme acquis que M. Yves fortier, président de l'Alcan est bel et bien le même représentant gouvernemental dans le controversé dossier des négociations de l'Approche commune. Si vous vouliez avoir une preuve que les Parlements québécois et canadien (tous partis confondus) sont les deux semelles de bottes des multinationales qui dépouillent les régions ressources du Québec, considérez cela comme mortellement établi.

À l'issue de la conférence de presse donnée au Hilton de Montréal, la semaine dernière, par les big boss de l'Alcan et de Rio-Tinto, M. Fortier, comme le paon de la fable, n'a pu s'empêcher de mettre en évidence le rôle de premier plan qu'il tient dans le dossier empoisonné de l'Approche commune et dans celui de la multinationale de l'aluminium.

Avec un type de cette qualité et des gouvernements supérieurs totalement inféodés envers les multipuissants de ce monde pourri (provincial et fédéral), les Québécois sont sûrs et certains de ne pas être entendus. Mais, consolons-nous, ce sera évidemment pour notre bien et en notre nom qu'on nous donnera le coup de grâce ! Et cela semble s'avérer déjà dans les faits du Québec médiatique Inc. En effet, pour une raison qui nous échappe, aucun média n'a cru bon communiquer cette information cruciale et susceptible d'influencer le cours des événements. Pourquoi ce mutisme généralisé (?!?!?)

Akakia

Fusion Rio-Tinto—Alcan... et Approche commune. Danger ! Danger !!

De gauche à droide de ce select Club de profiteurs du parlementarisme à l'anglo-saxonne : Dick Evans (PDG d'Alcan) ; Paul Albanese (PDG Rio-Tinto) ; Yves Fortier (président d'Alcan) ; Paul Skinner (président de Rio-Tinto).

Fusion Rio–Tinto—Alcan... et Approche commune. Danger ! Danger !! l'affaire mérite d'être fouillée et discutée avec célérité

À propos de la fusion « Rio-Tinto—Alcan », voici une lettre que je viens de recevoir en catastrophe de M. Jean-Pierre Plourde, homme d'affaires du Saguenay. Si cette information s'avère comme je le redoute déjà, comprenez bien que les Métis de la Boréalie, le peuple du Saguenay–Lac-Saint-Jean et les travailleurs de l'Alcan au Québec ont tout à craindre pour la suite des événements. Si vous aviez espéré être déjà morts, détrompez-vous ce n'était encore qu'un mauvais rêve. Le cauchemar de notre mort lente se poursuit !!!

À ceux et celles qui parcourent ce blogue de commenter et d'éprouver cette information de dernière heure qui m'apparaît cruciale sinon vitale.

Akakia


Bonjour M. Bouchard;
Vous avez appris comme moi par la radio que l'Alcan a été achetée...

Ce que l'on sait beaucoup moins, c'est que M. Yves Fortier, président du conseil d'Alcan qui a parlé cette semaine à la radio, est le même monsieur, nommé par M. Charest pour nous représenter, est le chef négociateur dans l'Approche commune en notre nom.

Hors la langue, ce monsieur n'a aucune affinité avec nous...

Pour un CV impressionnant de ce Monsieur, tapez son nom sur le moteur de recherche google, vous allez tombez dessus dès la première page.

Vous y apprendrez que ce monsieur était important dans le conseil pour l'unité canadienne, chez Bell, Université McGill, et bien d'autres choses encore qui ont rien a voir avec nous...

Comme conflit d'intérêt, c'est dur à battre, c'est cela être juge et parti !

J'ose espérer que ces quelques donnés additionnelles vous seront utiles !

Ou peut-être le saviez vous déjà ?

On est dans une vrai République de banane.

Je suis persuadé que nos enfants, et, les enfants de nos enfants seront très sévères envers nous!

Bienvenu en Palestine d'Amérique...

Nous assistons, impuissant, à la suite de la conquête et la fin de la bataille des Plaines d'Abraham.

Confirmez la réception du message et si vous connaissiez cette donnée!

Jean-Pierre Plourde


Pour correspondre avec l'auteur de la lettre, Jean-Pierre Plourde, voir les adresses de son site et de son e-mail :
< saglacweb.com >
< saglac@gmail.com>

mercredi, juillet 11, 2007

Canada-Québec, la vente de garage se poursuit jusqu'à ce que mort s'ensuive !...


Léo-Paul Lauzon dixit...
 
Il ne peut y avoir de souveraineté politique, culturelle et linguistique pour quelque pays que ce soit sans une souveraineté économique digne de ce nom et encore plus pour des pays en voie de développement et des petits pays comme le Québec. Dans l’indifférence… et même l’enthousiasme.

Alors que d’autres pays beaucoup plus puissants que le Québec et le Canada refusent carrément que soient vendus à l’étranger des joyaux nationaux, au nom de l’intérêt stratégique et de la sécurité nationale, ici au Québec, c’est dans l’indifférence et plus souvent dans l’enthousiasme que sont cédés à des étrangers nos instruments collectifs.

Aux États-Unis, en Europe, on s’offusque plus qu’au Canada de prises de contrôle par des étrangers. J’ajouterais que les intérêts des Québécois et des Canadiens sont généralement opposés à celui des actionnaires et des dirigeants et qu’en Europe et aux États-Unis, l’État intervient souvent pour bloquer des ventes d’entreprises nationales à l’extérieur.

Vous vous dites sûrement pourquoi alors, si les autres le font et vont même jusqu’à la nationalisation directe ou indirecte, avec une forte participation de l’État qui lui donne le contrôle effectif ou un droit de veto sur la vente à l’étranger de compagnies, nous ne le faisons pas ici et encore plus compte tenu de la petitesse de notre secteur économique et de sa vulnérabilité face aux multinationales étrangères beaucoup plus imposantes et dotées de moyens financiers infinis ? Eh bien, la raison est simple : nous sommes dirigés par des politiciens à la fois vendus et ignorants qui ont principalement à cœur leur propre personne et celle de leurs amis, et non l’intérêt supérieur de la majorité.

Jean-Paul Gagné, champion toutes catégories
Le comble de l’imbécillité et de la soumission la plus totale est Jean-Paul Gagné, l’éditeur du journal Les Affaires. Dans son éditorial du 1er juillet 2006, intitulé : « Vente d’Inco et de Falconbridge : Ottawa doit dire oui », il a écrit : « Un veto d’Ottawa enverrait un mauvais message (sic) dans les marchés financiers et notamment à Washington (sic), où on voit le Canada un peu (je dirais même beaucoup) comme le prolongement (je dirais même la colonie) des États-Unis (sic). Toute transaction qui affaiblit notre souveraineté économique est difficile à accepter (sic) mais le système économique dans lequel nous vivons nous oblige (vous m’en direz tant !) à accepter (faut se soumettre sans rechigner) les règles du jeu (quelles règles ?) qui l’accompagnent ». Faut le lire pour le croire !

Heureusement, d’autres ont une autre compréhension du phénomène. Dans un article du Journal de Montréal du 5 décembre 2001 titré : « Le président de CGI s’inquiète des trop nombreuses ventes d’entreprises à des étrangers », Serge Godin déclare que : « Les ventes très nombreuses d’entreprises québécoises et canadiennes à des intérêts étrangers m’inquiètent beaucoup. Je suis persuadé que ces déplacements de centres de décision vers l’extérieur ont un effet nocif sur notre économie, sur l’emploi, sur notre capacité d’établir le maximum de synergie entre nos entreprises pour générer la richesse chez nous. ».


Nike accroche les patins de Gaétan Boucher

Le cas de la vente de Bauer à Nike l’illustre bien comme le décrit cet article de Simon Drouin paru dans La Presse du 7 juin 2001 et intitulé : « Bauer Nike Hockey retranche Gaétan Boucher ». On peut y lire ce qui suit : « Le congédiement de M. Boucher, 43 ans, fait partie d’une restructuration des activités de Bauer Nike Hockey au Québec. Au terme de cette opération, l’usine de Saint-Jérôme comptera 135 employés de production et 72 employés de bureau. Lors de l’achat de Bauer par le géant américain Nike en décembre 1994, 1200 personnes y travaillaient.

Bauer Nike Hockey compte aussi vendre ou louer une portion considérable de l’édifice de Saint-Jérôme. Quant au siège social de Montréal, il fermera ses portes à la fin du mois. Le congédiement de Gaétan Boucher (le plus grand médaillé québécois de l’histoire des Jeux Olympiques) fait partie de notre plan de restructuration et, comme tous les autres employés, c’est très malheureux, a dit Michelle Mc Sorley, porte-parole de Bauer Nike Hockey ».

Il y a beaucoup d’autres exemples. Au cours des dernières années, la vente d’entreprises québécoises présentes dans des secteurs stratégiques pour l’émancipation de la province et surtout de compagnies qui furent jadis propriété de tous les Québécois par le biais de l’État et de ses sociétés d’État comme la Caisse de dépôt et placement, la Société générale de financement, la Société de développement industriel devenue Investissement Québec, Dofor, Soquia, Soquem, etc. s’est multipliée au nom de dogmes creux comme la mondialisation, le libre-échange, l’État minimal non-interventionniste, les supposées lois naturelles du marché, l’adaptation, le modernisme et d’autres conneries du même genre.


La liste est longue, longue, longue

Prenons le cas de quelques entreprises québécoises qui étaient détenues directement (contrôle légal) ou indirectement (contrôle effectif) par le gouvernement du Québec comme Biochem Pharma vendue en 2001 pour 5,9 milliards$ à l’anglaise Shire Pharmaceuticals ; Provigo, le plus important détaillant et grossiste en alimentation au Québec, vendue en 1998 pour 2 milliards$ à l’Ontarienne Loblaw et à sa compagnie-mère George Weston ; Cambior, le plus important producteur d’or québécois, vendue au mois de septembre 2006 à l’ontarienne Iamgold pour 1,3 milliards$, Domtar, la plus importante papetière québécoise, vendue au mois d’août 2006 à l’Américaine Weyerhaeuser pour 3,3 milliards$ et Sico, le plus important fabricant québécois de peinture, vendue au mois d’avril 2006 au néerlandais Akzo Nobel pour 288 millions$.

Faute d’espace, je n’aurai pas le temps de vous parler de plusieurs autres compagnies québécoises vendues récemment à des étrangers, comme Bombardier Capital, Bombardier Récréatif, La Senza, Maax, Softimage, Dollarama, Delisle, Vachon, Multi-Marques, Gadoua, UAP, Le Groupe Commerce, La Laurentienne Générale Assurances, Meloche Monnex, Bélair Direct, Ivaco, Unibroue, Sports-Experts, Réno-Dépôt, Urgel Bourgie, C-Mac, Sabex, Nova Bus, Prévost Car, Cinar, Sodisco, Culinar, Microcell et Fido, Télésystèmes Mobile, Intersan, Jean-Marc Brunet, Adrien Gagnon, Technilab, Celmed, Bauer, les Alouettes et le Canadien de Montréal, Molson, Corby, Seagram, les papetières Donohue, Stadacona, Alliance, Forex, Foresbec, Avenor, Repap, Cartons St-Laurent, Consolidated-Bathurst, Abitibi-Consol, etc. Et cette liste est loin d’être exhaustive.


Je leur lance un défi !

Je mets au défi tous ceux qui nous disent que les compagnies québécoises peuvent aussi acheter des étrangères de me préparer leur énumération. Il ne faut pas être une lumière pour comprendre qu’à ce petit jeu tronqué, les multinationales étrangères, qui sont mille fois plus grandes vont tout ramasser ce qui les intéresse au Québec dans le temps de le dire, incluant Van Houtte, Québécor, Jean Coutu, Rona, Métro, la Banque Nationale, Cogeco, Transcontinetal, Cascades et même CGI alors que les nôtres vont acheter de petites et moyennes entreprises ici et là.

Dans mes prochains articles, vous allez pomper avec moi, car vous allez voir comment la vente de nos instruments collectifs qu’étaient Biochem Pharma, Provigo, Domtar et Cambior ont enrichi de minables petits affairistes d’ici qui ont réussi à s’abroger, sans que ça leur coûte une maudite cenne noire, ces quatre compagnies publiques québécoises avec la complicité de vos politiciens.

Quatre cas de privatisation

1er cas : Biochem Pharma
La privatisation, et la vente à l’étranger qui s’ensuivit, de joyaux collectifs québécois, comme Biochem Pharma, Provigo, Domtar et Cambior, s’est effectuée au nom de dogmes primaires et n’a profité qu’à quelques petits affairistes minables.
La prestigieuse revue The Economist a dit récemment que la vente de sociétés québécoises et canadiennes à l’étranger aurait soulevée des passions et une levée de boucliers ailleurs. Ici, rien, même que ça se fait dans l’enthousiasme. Faut être arriérés et colonisés pas à peu près.

L’ancêtre de Biochem Pharma était l’Institut Armand Frappier, un organisme étatique au Québec rattaché au réseau de l’Université du Québec. C’est cet organisme de recherche public qui, à l’aide uniquement de fonds et de chercheurs publics, avait inventé, entre autres, le plus célèbre médicament pour lutter contre sida, le 3TC.

Cette société était un succès total. Puis, le gouvernement du Québec, au nom de l’idéologie néolibérale, l’a privatisée et la compagnie a changé de nom pour Biochem Pharma. On a mis en place des faiseux qui l’ont inscrite en Bourse et qui se sont naturellement octroyés des mégas parachutes dorés composés d’options d’achat d’actions, de caisses de retraite et d’indemnités de départ.

Puis, afin de profiter de la manne, les dirigeants de Biochem Pharma, avec à sa tête l’opportuniste par excellence Francesco Bellini, ces gens qui n’ont eu rien à voir avec les découvertes de la firme, qui n’ont rien investi et, de ce fait, pris aucun risque, ont décidé de vendre en 2001 ce formidable instrument collectif à l’anglaise Shire Pharmaceuticals Group pour 5,9 milliards de dollars.

Le titre de cet article du journal Les Affaires du 23 décembre 2000, rédigé par André Dubuc et Francis Vailles, va tout vous dire sur qui a profité de ce honteux délestage : "Les dirigeants de Biochem Pharma empocheront plus de 325 millions", dont la bagatelle somme de 261 millions$ à Francesco Bellini.

Au premier paragraphe de l’article, il est dit que : "En vendant, les dirigeants de Biochem Pharma n’auront plus les coudées franches, mais ils auront les poches bien garnies… En rétrospective, les hauts dirigeants auront profité des décisions récentes (sic, c’est-à-dire juste avant la vente) de l’entreprise concernant leur rémunération".

Puis, pour nous écoeurer encore plus, Bellini a dit des énormités dans un article de La Presse du 12 mai 2001 de Denis Arcand intitulé : "Bellini a le cœur brisé… Je ne suis pas un lâcheur". Un lâcheur et un profiteur si vous voulez mon avis.
Comment se fait-il que le gouvernement péquiste et la population du Québec n’ont rien fait pour stopper cette transaction ? N’y a-t-il pas de secteur plus stratégique pour un pays, générateur d’investissements, de recherches et d’excellents emplois, que le domaine pharmaceutique ?

La France n’a-t-elle pas récemment empêcher la vente à des étrangers de sa pharmaceutique Aventis ? Essayez donc pour voir de faire une offre d’achat émanant d’étrangers sur les Américaines Merck et Pfizer. Lors de la vente à l’étranger de Biochem Pharma, de Provigo, de Domtar, de Cambior et même des Canadiens et des Alouettes de Montréal, où étaient donc nos intrépides et aventureux gens d’affaires et nos lumineux lucides qui nous accusent pourtant régulièrement d’immobilisme ?

Ce qu’il aurait fallu faire, comme beaucoup d’autres pays d’ailleurs, c’est de créer, comme l’a suggéré récemment Québec Solidaire, une société d’État comme Pharma Québec qui aurait hérité de Biochem Pharma (Institut Armand Frappier) et qui aurait aussi pris des participations dans d’autres jeunes compagnies pharmaceutiques québécoises.

Ainsi, nos découvertes, nos emplois, nos investissements et notre argent resteraient ici même au Québec. Nos politiciens doctrinaires préfèrent verser des milliards de dollars en fonds publics à chaque année sous forme uniquement de subventions, et non d’achats d’actions, à des compagnies qui sont ensuite vendues à des étrangers au seul profit de leurs actionnaires, comme ce fut le cas ces dernières années dans le domaine pharmaceutique avec Sabex, MultiChem, ID Biomédical, Technilab, Anapharm, Promedis, Pangeo Pharma et Celmed Biosciences.

Dans le cas de Celmed Biosciences vendue au mois de novembre 2006 à la hollandaise Kiadis, qui toutes deux se spécialisent dans les médicaments contre le cancer, le titre de l’article de La Presse du 29 novembre 2006 est révélateur : "Celmed Biosciences : le siège social quitte Montréal", même si Celmed représente 70% des actifs de la nouvelle entreprise.

Et puis, même si les gouvernements et Francesco Bellini nous avaient juré avoir obtenu des assurances bétonnées, "Shire ferme le labo de Biochem à Laval", tel était le titre de l’article de La Presse du 1 er août 2003 dans lequel on pouvait lire ceci : "Trois ans après avoir acheté la pharmaceutique lavalloise Biochem Pharma, et deux jours après avoir obtenu un contrat de vaccins de plusieurs millions du gouvernement fédéral, l’anglaise Shire Pharmaceuticals a annoncé hier la fermeture du centre de recherches Biochem de Laval…

Les 120 scientifiques et administrateurs du prestigieux laboratoire ont été avisés hier qu’ils seront licenciés". Terminons au moins sur une note positive. Au mois de décembre 2006, Francesco Bellini vient de nous annoncer qu’il va s’installer en Alberta. Bon débarras. Si ça peut juste inciter d’autres profiteurs comme lui à faire de même, on ne s’en porterait que mieux. On est prêt à payer le transport et le cognac pour fêter ça.

2e cas : Provigo
L’histoire de Provigo, le plus important distributeur et grossiste en alimentation au Québec, est celle d’un retentissant succès né de véritables entrepreneurs dignes de ce nom suite à la fusion de Couvrette et Provost, Lamontagle et Denault. Pendant longtemps, le contrôle majoritaire de ce joyau collectif était détenu par trois sociétés d’État québécoises que sont le Caisse de dépôt et placement du Québec, la Société générale de financement du Québec et Soquia.

Notre bon gouvernement du Québec a d’abord nommé à sa tête des opportunistes de luxe. Comme président et chef de la direction, ce fut Pierre Migneault qui eut la bonne idée aussi d’embaucher sa conjointe Sylvie Lorrain à titre de vice-présidente déléguée, qui elle également passera à la caisse. Comme président du conseil, ce fut Pierre Michaud, actionnaire majoritaire de Réno-dépôt qui a depuis vendu sa business à une compagnie française.

Puis, le "brainwashage" et la propagande du faiseux Pierre Michaud a commencé, comme le démontre clairement le titre de ces deux articles du Devoir et du Journal de Montréal parus le 12 avril 1995 : "Le président du c.a. de Provigo souhaite que la "saga" finisse. Pour Pierre Michaud, la Caisse de dépôt ne devrait plus contrôler la compagnie", et "Pour le bien de l’entreprise, il faudrait que Provigo appartienne à une multitude d’actionnaires. Pierre Michaud, président du conseil".

On se laisse dire n’importe quoi, par n’importe qui sans rien dire. Quelqu’un peut-il dire à ce petit monsieur que c’est lorsqu’une compagnie appartient à l’État qu’il compte le plus de propriétaires, soit plus de 7 millions de québécois et c’est ce qui est le mieux pour l’entreprise, la population et le Québec.

Nos journalistes, avec leur légendaire sens critique, se sont laissé dire et ont rapporté fidèlement les conneries des dirigeants. Vraiment pathétique ! Puis, comme il va de soi, "Si Provigo passe à Loblaw, le tandem Migneault-Michaud passera à la caisse", tel était le titre de l’article de Miville Tremblay paru dans La Presse du 4 novembre 1998. Encore une fois, des gens qui n’ont pas fondé l’entreprise, qui n’ont rien investi et qui n’ont pris aucun risque, ont empoché des millions de dollars.

Dans un article de La Presse du 9 janvier 1999 intitulé : "Pierre Migneault ne devrait pas faire de vieux os chez Provigo", il est dit ceci d’intéressant au premier paragraphe : "Le président de Provigo s’est dit prêt à rester en poste sous la nouvelle direction de Loblaw. Mais avec le parachute doré qu’il s’est négocié (sic), comment pourrait-il refuser de sauter ?". Effectivement, Migneault-Michaud ont sauté et très vite en plus de ça.

"Loblaw avale Provigo. L’offre du géant ontarien survient au moment où la Caisse de dépôt, Métro-Richelieu et Provigo travaillaient à un projet de rapprochement", tel était le titre de l’article du Devoir du 1 er novembre 1998. Même si la Caisse de dépôt et Métro-Richelieu étaient prêts à tout faire pour que le contrôle de ce géant reste au Québec, nos politiciens n’ont rien fait, de même que nos aventureux gens d’affaires d’ici qui ont pourtant horreur de l’immobilisme. Loblaw, une filiale de George Weston a payé 2 milliards$ pour faire l’acquisition de Provigo.

Pour l’essor de l’industrie agro-alimentaire du Québec, il aurait fallu que notre gouvernement intervienne pour forcer la fusion de Métro et de Provigo et contraindre ces détaillants à faire un minimum de place sur leurs tablettes à nos PME québécoises comme Lavo, Leclerc, Carrière, Yoplait, Lassonde, Cascades, Lafleur et d’autres.

Comment nos petites entreprises québécoises peuvent-elles, dans cette industrie, tenir tête à des multinationales comme General Foods, Kraft et Nestlé ? Penser le contraire, c’est faire preuve d’une forte dose de pensée magique. Si d’autres pays le font, pourquoi alors ne le faisons-nous pas au nom du pragmatisme et du gros bon sens ?

Mais dans le cas de nos biens publics, le profit rapide empoché par les dirigeants opportunistes importe plus que le bien être de l’ensemble des Québécois et des générations futures, comme l’a très bien signalé l’article de Miville Tremblay de La Presse du 4 novembre 1998 mentionné plus tôt : "On comprend que le tandem Migneault-Michaud ait trouvé moins intéressante l’offre de Métro-Richelieu où l’appréciation du titre aurait été possible de manière plus graduelle et plus incertaine". Valait mieux empocher les millions tout de suite et décrisser avec le pognon.

Le titre de ces articles va vous donner une bonne idée de ce qui s’est produit par après, suite à la vente de Provigo à l’Ontarienne Loblaw :
 "Provigo déleste 125 employés de son siège social". Les Affaires , 26 juin 1999 ; 
  "Vente de Provigo à Loblaw : l’inquiétude demeure grande parmi les producteurs et transformateurs québécois". Le Devoir , 28 août 1999 ; 
  "Provigo restructure ses services informatiques", La Presse, 14 février 2002. 50 Postes en moins au Québec ; 
  "Centralisation de Loblaw à Toronto. L’agroalimentaire québécois s’inquiète", La Presse , 5 mai 2006 ; 
  "Loblaw fait le ménage au Québec", La Presse , 17 novembre 2006. On peut lire que : "Après avoir délesté deux centres de distribution qui employaient 140 personnes l’an dernier, Loblaw fermera 27 magasins au Québec au cours des prochains mois".

Puis, concernant le cas précis du secteur de la boulangerie au Québec, voici une autre belle histoire impliquant Weston, la compagnie-mère de Loblaw. Dans un premier temps, "Weston évince les pains Gadoua", tel était le titre de l’article du Journal de Montréal du 26 mai 2001. Fini les pains et autres produits de la québécoise Gadoua dans les marchés Provigo, Maxi et Loblaws. Ils seront remplacés par les produits Weston, bien évidemment. On est jamais mieux servi que par soi-même, n’est-ce pas ?

Puis, comme une PME comme Gadoua ne peut supporter financièrement une telle perte de clientèle, ce qui devait arriver arriva, "La boulangerie Gadoua se laisse avaler par la torontoise Weston", que titrait l’article de La Presse du 8 juillet 2004. Fantastique. Peuple colonisé, soumettez-vous à genoux ! Dans la même veine, le président de la chaîne québécoise de dépanneurs Alimentation Couche-Tard, Alain Bouchard, avait déploré la vente de la boulangerie québécoise Multi-Marques à l’Ontarienne Canada Bread et avait dit que cela sera dommageable pour l’économie québécoise dans un article du Journal de Montréal du 24 janvier 2001 intitulé : "La vente de Multi-Marques à Canada Bread Compagny : Une belle occasion ratée, dit Alain Bouchard".

3e cas : Domtar
N’y a-t-il pas secteur aussi névralgique pour un pays d’être propriétaire de ses ressources naturelles comme les autres pays occidentaux le sont. Uniquement dans le secteur des pâtes et papier, voici une liste non exhaustive de compagnies québécoises qui sont passées à des intérêts étrangers ces dernières années sans que personne n’intervienne : "Papiers Stadacona, Alliance, Forex, Consolidated-Bathurst, Foresbec, Avenor, Cartons St-Laurent, Repap et Donahue. À quand le tour de Cascades et de Tembec ?

Domtar, la plus importante papetière québécoise, qui, il n’y pas si longtemps, était détenue majoritairement par l’ensemble des Québécois par le biais de la Société générale de financement, de la Caisse de dépôt et placement et de Dofor. Mais voilà, au nom de l’idéologie néolibérale qui préconise l’État très minimal et déifie le pseudo-marché fondé sur le capitalisme global, nos minables politiciens l’ont privatisé sans aucun débat public, ont nommé comme dirigeants de petits faiseux, plutôt que de véritables commis d’État, qui ont vite fait de vendre à des étrangers en empochant des millions de dollars grâce aux parachutes dorés qu’ils s’étaient octroyés.

"Domtar passe aux Américains (la papetière Weyerhaeuser). Une opération de 3,3 milliards$. Québec réagit prudemment", tel était le titre de l’article du Devoir du 24 août 2006. Ben non, le gouvernement libéral du Québec n’a pas réagi prudemment ; Jean Charest et Raymond Bachand, son ministre du Développement économique, ont applaudi, en vrais colonisés qu’ils sont, à cette prise de contrôle étrangère comme il a été signalé dans l’article du Devoir du 26 août 2006 : "Québec ne s’opposera pas à la fusion entre Domtar et Weyerhaeuser".

Quant au Parti québécois, il fut égal à lui-même en donnant son accord mais avec prudence : "PQ : la prudence est de mise", que titrait le Journal de Montréal du 25 août 2006. Comme à l’habitude, on s’est fait rassurant pour les jobs et le maintien du siège social à Montréal, comme le titrait Le Devoir du 24 août 2006 : "Domtar se fait rassurant pour les emplois au Québec".
Le petit parvenu de président de Domtar avait passé son message aux politiciens dans ses médias et avec l’appui indéfectible de ses loyaux journalistes, comme le signale de façon explicite le titre de cet article de Michel Van de Walle paru dans le Journal de Montréal du 10 novembre 1995 : "Le président de Domtar souhaite que Québec vende son bloc de la papetière".
Dans l’article, il est dit ceci de vraiment intéressant : "Selon le président Stephen Larson, le contrôle exercé par le gouvernement du Québec sur le capital-actions de Domtar a un effet dépressif (sic) sur le titre en bourse. Québec a acheté 42% des titres de Domtar en 1981 pour éviter un transfert d’activités en Ontario".

L’important c’est la hausse rapide du prix de l’action afin d’engraisser les arnaqueurs de première classe et au diable les besoins des autres. Que pensez-vous que le gouvernement français aurait répondu à ce petit parvenu s’il lui avait demandé de se délester des actions qu’il détient directement et indirectement dans Renault, Airbus, EADS, France Télécom, Électricité de France, Sanofi-Aventis, etc ?

Tout de même bizarre, en 1981, le gouvernement du Québec prend le contrôle effectif de Domtar afin d’empêcher sa vente à l’étranger et 25 ans plus tard il applaudit et participe à sa vente à l’Américaine Weyerhaeuser. Autres temps, autres mœurs ! Un exemple éloquent que la modernisation, l’adaptation et la réingénierie de l’État riment avec colonisation.

4e cas : Cambior
C’est en 1986 que le gouvernement du Québec a privatisé pour des miettes Cambior, le plus important producteur d’or québécois, qu’il détenait par le biais de la société d’État Soquem. Naturellement, de petits dirigeants incompétents ont été mis en place, dont le président Louis Gignac qui, par après, a presque acculé à la faillite Cambior par une très mauvaise gestion de couverture des risques.

Il n’aurait pas fallu que cet impair, qui a coûté des dizaines de milliards de dollars à Cambior, eut été fait du temps que l’entreprise était propriété de l’État sinon on en aurait entendu parler par ben des arrivistes qui auraient alors exigé la privatisation sur le champ. Ils sont toutefois plus compréhensifs et plus tolérants pour les erreurs commises par le privé et loin d’eux l’idée de suggérer la nationalisation dans ces cas.

Puis, pour 1,3 milliard de dollars, "Le producteur d’or Cambior passe entre des mains torontoises. L’union avec Iamgold donnera naissance à la dixième entreprise aurifère mondiale", que titrait Le Devoir du 15 septembre 2006. Comme cela va de soi dans ce type de transaction : "Le Québec minier déplore la perte du siège social de Cambior", que titrait l’article du journal Les Affaires du 23 septembre 2006 dans lequel le journaliste François Riverin mentionne que : "La transaction se traduira par la disparition du siège social d’un producteur minier de taille importante au Québec au profit de Toronto, avec les effets négatifs sur les emplois et les fournisseurs de service que cela implique". Je suppose que c’est comme ça qu’on va s’enrichir au Québec et que cela va profiter pleinement aux générations futures ?

Le mot de la fin de cette autre triste histoire revient à la pathétique chroniqueuse de La Presse , Michèle Boisvert qui, après la "touchante" entrevue que lui a aimablement accordée le président de Cambior Louis P. Gignac, a titré son texte ainsi : "Transaction sur fond de tristesse".

Naturellement, la madame a laissé Ti-Louis Gignac dire n’importe quoi sans l’ombre d’un minimum de sens critique. Comme Francesco Bellini avait le "cœur brisé" lorsqu’il a vendu Biochem Pharma à l’anglaise Shire, Louis Gignac, qui est le seul responsable des difficultés financières de l’entreprise est, quant à lui, "triste" de la vente de Cambior à l’ontarienne Iamgolg. Tous les producteurs d’or au monde font depuis plusieurs années des affaires "d’or" alors que Cambior végétait. Cherchez l’erreur chez celui qui est attristé, mais qui, comme les autres, empoche "légitimement" des millions de dollars pour l’aider à passer au travers de cette dure épreuve. Une chance qu’il y a des chroniqueuses humanistes comme Michèle Boisvert de La Presse pour leur prêter une oreille attentive, les comprendre et partager leur douleur devant de tels drames, sinon ces affairistes de grands chemins auraient certes des pensées suicidaires.

Léo-Paul Luzon

mercredi, juillet 04, 2007

« Au Québec, il y a une autre sorte de régions appelées « ressources » ! – (Robert Dutil, 3 juillet 2007)

Les régions « voleuses de jobs »

Le journal Le Devoir a vraiment décidé de nous impressionner cet été avec sa série sur le Québec qui s'éclate. L'invité vedette de cette semaine du 3 juillet, est nul autre que Robert Dutil, un affairiste Beauceron qui a sa manière bien à lui de comprendre l'effondrement du plat pays. Pour expliquer son point de vue, M. Dutil prend prétexte de l'histoire d'un ouvrier d'usine âgé de 45 ans, Charles, marié et père de deux adolescentes, fidèle à sa femme comme à la même entreprise beauceronne depuis 25 ans, et réduit au chômage après la fermeture de l'usine qui ne parvenait plus à faire face à la concurrence. Pour boucler les fins de mois, égaliser le salaire perdu et donner à sa femme le minimum nécessaire dans l'espoir qu'elle cesse de lui pomper l'air, Charles dut se résoudre à un double emploi où il dut donner, à ses nouveaux employeurs, davantage de travail pour un chèque de paie et un estime de soi passablement diminués.

Ulcéré de voir sa part de richesse ainsi érodée et s'étant fait rappeler que l'herbe était bien plus belle chez le voisin, Charles jeta donc le regard du côté des « régions appelées ressources ». Il comprit ainsi qu'il avait tout à gagner à plier armes et bagages sans plus tarder pour trouver fortune dans le nouvel Eldorado boréalien ! Car, cela est mal connu des Québécois de la grande ville pérorise Dutil, « au Québec, il y a une sorte de régions appelées « ressources ». [Et] dans sa grande sagesse, le gouvernement a décidé de réduire le taux de chômage de ces régions considérées comme défavorisées en subventionnant largement les concurrents de l'entreprise où Charles gagnait modestement sa vie : 30% de l'augmentation de la masse salariale, pas d'impôts, pas de taxes sur le capital, pas de participation au Fonds de Santé ».

Cette judicieuse enquête menée auprès de ses bons patrons fit finalement comprendre à Charles qu'il avait perdu son emploi simplement parce que l'État québécois subventionnait les entreprises concurrentielles dans les « régions ressources ». Et comme il n'y a pas d'effet sans cause, le pauvre homme fit les liens d'usage qui s'imposent. Il comprit qu'une telle « injustice ! » créait une « concurrence déloyale » aux entreprises des centres urbains gravitant autour de Montréal ; que « ces régions chanceuses qui bénéficiaient de ces privilèges » sont en réalité des « voleuses de jobs » qui nuisent aux usines tant beauceronnes que montréalaises ; qu'il est, comme tous ceux de son espèce en perdition, c'est-à-dire un... « dommage collatéral » de ces politiques prônées par ces « beaux esprits qui écrivent dans les journaux » et font pression sur le gouvernement ; et que c'est là l'inconcevable « prix à payer pour occuper le territoire ». C'est écrit avec ces mots dans le texte du Jarret Noir !


Le principe dutilien de « La Juste inégalité », ou l'art de casser le Québec en deux

Pour bien poser le problème endémique d'un Québec fracturé en deux, rien ne pouvait être mieux dit ! La manière dutilienne de concevoir l'intervention de l'État dans les régions du plat pays et cette façon horriblement condescendante de parler des « régions ressources » du Québec comme des brebis galeuses et des « voleuses de jobs » gâtées par les largesses de l'État, expliquent assez bien le fond du problème. Dans l'esprit du Beauceron, il y a le Québec qui a le droit de vivre (le sien), et il y a celui qui n'a que le droit de mourir (les « régions ressources ») !

Ainsi donc, pour Robert Dutil, la suite de l'histoire est déjà toute tracée. « Demain, si le gouvernement ne révise pas rapidement sa façon [d'aider les régions ressources] en évitant ces effets pervers, le nombre de ces Charles sera tel que le Québec sera irrémédiablement coupé en deux, sans espoir de réconciliation ». Voilà, encore une fois, qui devrait faire plaisir aux maîtres à penser du journal Le Devoir, aux Montréalais, à leur maire et à leurs banques qui estiment, dur comme fer, que les fameuses régions ressources du Québec en reçoivent trop pour ce qu'elles donnent (!) et qu'il faudrait tout simplement fermer celles qui minent la part revenant de droit à Montréal et ses régions contiguës comme la Beauce ; aussi bien dire le droit de cuissage qui ne va pas sans la part du lion, de la lionne, de ses lionceaux et de leurs commensaux.

Mais ce que ne dit pas M. Dutil cependant, c'est que son parcours parle pour lui et pour ses partenaires d'affaires. De fait, né à Saint-Georges de Beauce, le 16 avril 1950 avec une cuillère d'argent dans la bouche (son père était un industriel prospère de qui il a hérité du succès), notre analyste baby boomer a notamment occupé le fauteuil de maire de sa ville natale pendant six années consécutives (de 1979 à 1985), celui de préfet de la MRC Beauce-Sartigan (de 1982 à 1985) et de Directeur du CA de l'Union des Municipalités (il était donc titulaire d'une bonne dose de pouvoirs politiques quand furent planifiés et entamés, le 11 octobre 1985, les travaux de la Commission Parizeau sur les Municipalités*). Le succès étant toujours à l'heure donnée pour lui et ses proches, il a ensuite représenté le comté provincial de Beauce-Sud de 1985 à 1994 ; ce qui lui permit d'occuper le fauteuil rembourré de ministre Délégué aux Pêcheries sous Robert Bourassa (1985-1987), ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux (1987), ministre Délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux (1987), ministre des Communications (1988-1989), et de ministre des Approvisionnements et Services (1989-1994).

La liste de ses réussites d'affaires consécutives à son retrait de la vie politique étant très fournie, on me pardonnera ici de couper court à cette formidable ascension politique et de préciser que M. Dutil est aussi l'auteur de plusieurs livres qui lui ont mérité bien des prix et des médailles taturum, comme cela arrive parfois quand on a les habits cousus d'or et qu'on doit protéger les pouvoirs qui ont fourni le fil ! De fait, en 1995 notre enfant prodige, prospère et satisfait de lui-même a notamment publié, chez Québec-Amérique, « La juste inégalité », un essai de près de 300 pages portant sur la liberté, l’égalité et la démocratie ; bouquin fort savant dans lequel il est dit, en gros : « qu'on ne doit pas chercher à corriger toutes les formes d'inégalités mais uniquement celles qui sont le fruit de circonstances arbitraires ». Voyez le genre !


Un fils spirituel du rapport « HMR »

Il faut dire que M. Dutil en avait une bonne idée, lui, du principe de « la juste inégalité » des chances (sic !!!), des pouvoirs arbitraires et de la mauvaise répartition de la richesse collective à la manière du rapport « HMR ». Ce dernier ouvrage, soit dit en passant, est le petit cathéchisme sur lequel repose, depuis 1970, le fameux « modèle québécois ». Ce chant funèbre que Robert Dutil aimerait bien voir se perpétuer jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de Québécois dans les fameuses régions ressources pour critiquer ce fait et qu'ils soient tous, enfin, regroupés dans le dortoir industrio-commercial unissant la Beauce à Montréal.

Pour ceux qui ne connaissent pas ce plan, le fameux rapport HMR (titré « Les orientations du développement économique régional dans la province de Québec » **) est le concept philosophique et méthodologique sur lequel repose toute la stratégie du développement (lire sous-développement) du Québec depuis 1970. Il est la base des inégalités qui ont mené à la désintégration des régions ressources du Québec et il explique les origines de la fracture actuelle qui, d'ailleurs, n'a pas fini de s'agrandir. Ainsi, peut-on lire à la page 145 de ce sordide instrument de la mort lente d'une société qui disposait pourtant de tous les ressorts et avantages pour réussir brillamment ; « Il n'y a rien de répréhensible à supprimer la pauvreté et le chômage dans une région peu développée en attirant la population dans une ville dynamique ; l'essentiel des progrès passés s'est effectué précisément ainsi. » Du tout cuit pour Robert Dutil.

Trente-sept ans plus tard. Oui ! trente-sept ans après le début de la commission du crime d'État consacré ad nauseam dans la loi dutilienne de « l'inégalité des chances », voilà que quelqu'un fort bien branché, qui plus est l'un des maîtres associés par les ministères qu'il a occupés dans cette sordide politique nationale, ressort de son désert intellectuel pour nous resservir ce credo de malheur. Faut vraiment que ce peuple soit bête à en crever pour écouter sans dire mot une telle plaidoirie de la décadence humaine et pour redonner, encore et encore, toute la tribune à ce club d'intellectuels affairistes qui doivent une bonne part de leur succès à leurs accointances d'affaires et politiques, cette sorte de compérage qui se perpétue sans cesse dans le vide de l'État.

Ah oui, j'oubliais encore de dire avant de tirer le trait. Depuis plus de deux ans, M. Dutil —qui paie son électricité le même prix que ses concurrents des « régions ressources » et qui n'est pas pénalisé pour l'éloignement de la « ressource » ainsi que pour les frais qu'il Nous en coûte pour lui amener cette électricité jusqu'à ses usines, une électricité qui lui coûterait au moins quatre fois plus cher de l'autre côté de la frontière canado-américaine— fait partie d'une coalition qui réclame au nom de... « l'équité »*** l'abolition de mesures fiscales accordées à ces régions dites ressources, sous prétexte qu'elles provoquent une concurrence déloyale entre les entreprises qui en bénéficient et celles qui en sont exclues dans les mêmes secteurs d'activités. On se rappellera pour la forme, que M. Dutil a écrit et publié, il y a douze ans, un livre de quelque 280 pages faisant l'éloge du principe de « l'inégalité » des chances. Faut-le faire !...

Akakia

Notes
* Jacques Parizeau et coll., « Rapport de la Commission sur les Municipalités », Union des Municipalités du Québec, Crémédia Inc., 1986.

** B. Higgins, F. Martin & A. Raynauld, « Les orientations du développement économique régional dans la province de Québec », Rapport soumis au ministère de l'Expansion économique régionale, Ottawa, 1970, 156 pages et appendices.

*** Robert Dutil, « Concurrence déloyale - Régions centrales - L'équité n'est pas négociable », communiqué de presse adressé de son bureau de Telbec, le 30 mai 2007.

mardi, juillet 03, 2007

Maison Lévesque: une agonie lente et laide

Les badaux, touristes et citadins qui empruntent la rue Racine en cette période estivale doivent se confronter à une bien triste image en grimpant la côte de l’artère principale du cœur de notre ville. La maison Lévesque, à moitié démolie, y fait office de symbole d’un échec. Celui de notre administration municipale de garantir un développement durable et harmonieux pour notre cité. Voilà une image désolante et honteuse à montrer à ceux et celles qui viennent nous visiter.

Une fois les premiers coups de griffes donnés sur cette maison quasi-centenaire, pourquoi ne pas terminer la démolition? Pourquoi faire durer ainsi l’agonie? Est-ce que le projet de tour de 21 étages, qui doit prendre lieu et place sur ce terrain, est toujours viable, alors qu’on annonce la mise en chantier d’une autre construction semblable dans l’ancien Hôtel des gouverneurs, près de Place du Royaume?

Et si ce projet de tour avortait? Qui devrait-on blâmer pour la destruction inutile de notre patrimoine? Le promoteur qui n’avait pas bien mûri son projet, ou encore les élus de l’arrondissement de Chicoutimi, Marina Larouche et Jacques Fortin en tête, qui ne semblent pas avoir fait leur travail de gardiens du Bien Commun, de la sauvegarde et de la mise en valeur de ce qui est beau chez nous?

Éric Dubois
Citoyen de Chicoutimi (Saguenay)
482, rue Morin
Chicoutimi, (Qc)
G7H-4Y8
418.545.4670
ericdubois@sympatico.ca