Les délires d'Akakia

vendredi, septembre 21, 2007

Les accointances de Jean Charest, de l'Alcan et de Rio-Tinto

Dans une nouvelle de dernière heure, nous apprenons que le premier ministre du Québec, M. Jean Charest, vient de nommer Daniel Gagnier, directeur de son cabinet, en remplacement de Stéphane Betrand. M. Gagnier, un Montréalais de 61 ans, n'a rien du quidam recruté dans les couloirs des hôtels de ville du Saguenay ou du Lac-Saint-Jean qui triment dur par les temps qui courent pour obliger l'Alcan à payer ses taxes. Depuis 1994, et jusqu'à l'heure de sa nomination, M. Gagnier occupait le poste de vice-président principal aux affaires générales de la Compagnie Alcan.

Comme d'habitude, cette nomination édifiante est en train de passer comme beurre dans poêle auprès des médias qui ne semblent pas préoccupés le moins du monde par le phénomène de cause à effet dont il est porteur.

Pour ceux et celles qui ont la mémoire courte —et au Québec, grand Dieu du ciel bleu, nous savons tous qu'on pourrait écrire une encyclopédie en trente volumes de ce qu'on a oublié et une autre de trente de ce qu'on va oublier— ; pour ceux-ci et pour celles-là qui ont cette faculté d'oublier pour leur plus grand confort, il faut rappeler que cette « perle rare », cette « grosse pointure » (dixit le premier ministre), a été directement puisée dans les bassins de sédimentation de l'Alcan, une manière de faire qui est loin d'être une première dans cet étrange cabinet. En effet, on ne m'en voudra certainement pas de rappeler à votre douce mémoire (R.I.P. pour ce bon peuple qui s'écroule), qu'en février 2006, un ami et collègue de M. Gagnier, M. Yves Fortier pour ne pas le nommer, un chum de travail, un ex-président du C.A. de l'Alcan, s'était vu confier le poste de négociateur en chef du gouvernement Charest dans le controversé dossier de L'Approche commune.

S'il ne s'agit pas là d'une infiltration de l'Alcan au sein du cabinet Charest, il faut quand même avouer que le premier ministre du Québec a des amis qui pèsent lourd dans la consommation d'énergie hydroélectrique au Québec, et que cette sorte de monde a des intérêts directs dans la conclusion prochaine d'un traité avec les Ilnutsh, un traité qui, rappelons-le encore et encore, va aliéner pour les siècles et les siècles 45% du territoire du Québec. Difficile de croire et de penser que ces initiés des parquets boursiers, qui ont fait leur propre prospérité avec nos ressources naturelles sans se soucier de ce que le peuple du Québec en retire et qui se retrouvent dans les sommets de l'édifice gouvernemental, ne sont pas là en mission commandée pour le profit, et uniquement pour le profit de leur employeur et maître ?

Pour ma part, sachez que je ne donnerais pas ma chemise à blanchir à cette sorte de blanchisseurs. Inquiétant tout ça ! Très inquiétant !!!

Akakia

vendredi, septembre 14, 2007

Débat public sur les « accommodements » — La question qui tue !

La commission sur les « accommodements raisonnables » vient à peine de fermer les lumières sur sa première semaine d'audiences, et voilà que je commence déjà à trouver l'exercice passablement ennuyeux. Entre le co-président et l'assistance, je vous le dis de suite : je n'ai pas l'impression que la mayonnaise a réussi à prendre. Car il y a un tel décalage entre les prétentions du haut de la tribune et le peuple qui grouille tout en bas. Il y a une telle peur de la simple prise de bec, un tel souci de parer à tout débordement de langage, qu'il m'apparaît d'ors et déjà impossible de remplir ce fossé maladroitement creusé, au départ, par les deux co-présidents et les chefs qui leur ont confié ce périlleux mandat.

De fait, si je suis à peine surpris de voir tout ce bon peuple se prêter si candidement à cet exercice pourtant grave de conséquences, je vous avoue ne pas être bien impressionné par l'acuité et la pertinence des interventions que nous transmet une presse faiblarde, moralisatrice, gardienne à elle seule de l'image de tolérance et de générosité d'un Québec qui s'est dangereusement engagé sur la voie du multiculturalisme à la canadienne sans toutefois disposer des outils pour le contrôler.

Au rythme où vont les choses, Noël va être derrière nous, les co-présidents vont se retirer derrière leur mutisme solennel pour rédiger le rapport savant qui va étayer leur conclusion, et la vraie question, la mère de toutes les questions n'aura pas été posée ni même abordée. J'entends ici la question qui tue, celle qu'exprime le coup de chaleur d'Hérouxille. Je parle, de fait, du heurt inter-culturel provoqué par la dernière bouffée d'arrivants qui, faute d'un frein et d'un encadrement mesuré, dont on commence à peine d'apprécier le laxisme, ont pris tout le terrain que la société d'accueil leur a bien laissé prendre. Je parle de ces groupes d'arrivants tous azimuts, qui refusent de s'intégrer pleinement, qui sont en train de s'emparer, par défaut, du pouvoir de décider ce qui doit être bon pour tous, qui ont pris de l'assurance et qui ne se privent plus d'en imposer à cette majorité canadienne-française et métisse (euro-amérindienne s'entend) boutée hors de ses propres murs par ceux-là mêmes qu'elle a accueillis si généreusement.

Oui, toutes ces questions inutiles dans un décorum qui plus est ampoulé, pour faire semblant de regarder un horizon dépeint comme vrai mais qui s'avère faux comme un diamant du Canada. Inutile comme la question de la laïcité qui, pourtant, me semblait être un acquis au Québec depuis la fin des années soixante. Inutile comme la question de l'égalité entre les sexes et le respect des différences que je croyais, encore là, une valeur fondamentale, un acquis de notre civilisation post-révolutionnaire. Inutile comme celle du port du voile islamique pour aller au bureau de vote, alors que la culture et les coutumes du pays d'accueil devraient s'imposer d'elles-mêmes au Québec. Comme s'il était un crime de se réclamer de la race de nos pères et de nos mères. Comme s'il était une tare héréditaire d'être né(e) Métis(se) ou Canadien(ne) Français(se). Comme s'il fallait se justifier de parler encore le français, bien qu'en perte d'éloquence il est aussi vrai de dire. Comme s'il relevait de la xénophobie de réclamer simplement le respect pour ce que nous sommes encore, la voix fondatrice qui est celle aussi de la majorité, d'avoir la place qui nous revient de plein droit dans les livres d'histoire de ce vaste continent et de pouvoir vivre comme on a toujours vécu sur ce territoire.

De fait, la réalité qui a conduit à cet autre cul-de-sac à la « franco-québécoise », c'est que le Québec, comme le Canada, est rattrapé par la mondialisation contre laquelle il (le Québec) se croyait immunisé. Alors que l'autre (le Canada) s'en nourrit pour le noyer dans le multiculturalisme et le bilinguisme qui ne peuvent conduire qu'à l'assimilation totale et définitive des conquis de 1760. Car, cela se décèle de plus en plus, contrairement au Canada le Québec n'a pas été préparé mentalement pour pouvoir absorber ce double choc inter-culturel et ethnique qu'il aurait dû prévoir et qu'il subit aujourd'hui sans disposer des outils pour le bien gérer et pour en tirer profit dans le bon sens. Et comme outils, entendons d'abord une définition songée, acceptée et sacralisée de la « nation », une nation qui a le droit d'exclure puisqu'elle se définit, par automatisme, « inclusive ». Entendons également une constitution digne de ce nom, un texte fondateur exclusif au Québec et aux Québécois, là où les droits fondamentaux, individuels et collectifs seront définis et protégés sans qu'il soit possible de les réduire à tout jamais sous quelque prétexte que ce soit et surtout pas au nom du communautarisme. Et entendons, encore, des pouvoirs réels et exclusifs, tant sur l'émigration que l'immigration, la fissure par où les sociétés se font, se défont et se refont par les jeux d'histoire, de conquêtes et de trahisons.

Car le vrai fond du problème auquel nous sommes collectivement confrontés, n'hésitons pas à le dire sans ambages même si cela nous vaut encore quelques roches ; le fond du problème qui nous confronte et divise, il est, d'abord et avant tout, d'ordres racial, culturel et linguistique. Racial d'abord, parce que, hormis les Indiens qui ne se définissent ni Québécois ni Canadiens et qui ne s'embarrassent pas de cet exercice de style, les deux principaux peuples fondateurs du Québec, nommons encore les Métis et les Canadiens français, pour une raison et pour une autre dont la trahison des clercs, ces deux peuples fondateurs dis-je bien n'ont pas été en mesure d'imposer l'espace historique qui leur revient de plein droit dans leur espace territorial, ce qui est le socle de leur existence, les colonnes de leur dignité.

Culturel ensuite, parce que des historiens, des sociologues et des philosophes, justement ceux qui sont chargés d'ausculter les quatre faces du contentieux qui nous divise, sont aussi ceux qui ont réussi à promouvoir l'idée, aussi fausse qu'assassine, que pour être « inclusif », il faut d'abord « jeter les souches canadiennes-françaises au feu de la Saint-Jean-Baptiste » (sic). Un geste insensé qui explique en partie l'origine de ce malaise et qui conduit à l'ultime coup de grâce, une manière de s'assurer qu'on soit définitivement mort, enterré la tête en bas, et oublié.

Et linguistique enfin, parce qu'on n'a pas réussi à imposer aux arrivants la langue de la majorité québécoise, qui est celle de nos pères et de nos mères. Nommons la belle langue française, qui en arrache et qui perd du terrain au profit de la langue du conquérant qui est aussi celle de l'écrasante majorité anglo-américaine.

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Être ou ne pas être, en tant que Métis et Canadien français. Être à la racine de ce pays en devenir et à la source de l'esprit de la nation québécoise. Être ceci et cela, sans avoir besoin de s'excuser à chaque fois qu'on l'exprime haut et fort et qu'on l'exhibe fièrement ? Voilà la question que je crains ne jamais être posée dans cette commission ! Avons-nous, fondateurs de ce continent en devenir, le droit de vivre dignement dans cette mer anglo-saxonne qui absorbe tout comme une amibe ? ou n'avons-nous plus que celui de mourir dans la honte et le mépris, foulés au pied par ceux qui débarquent ? Voilà ce dont j'aurais aimé qu'on commence à causer dans ces forums et voilà ce qui a été totalement évacué jusqu'ici.

Akakia
Le 14 septembre 2007

vendredi, septembre 07, 2007

« La machination » !

« Le vieux malade très mortel au brillant et valide auteur du Panégyrique de la pitié, Oui la pitié est un don de Dieu, oui son panégyriste a raison et d'autant plus qu'il est très éloquent, car s'il ne l'était pas à quoi servirait-il d'avoir raison ? Oui la pitié est le contrepoison de tous les fléaux de ce monde. Voilà pourquoi Jean Racine prit pour sa devise dans l'édition de ses tragédies : « Phobos kai eleos ». Crainte et pitié. Voilà pourquoi on dit à notre messelatine le Kyrie eleison des Grecs. Voltaire à Louis-Guillaume-René-Cordier-Delaunay de Valéry , à Ferney 8 décembre 1777.
Proposé par Alain Sager et acheminé par Lucien Choudin, Voltaire à Ferney.


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Interrogé, hier (jeudi 6 septembre), sur la sortie du livre autobiographique de son ex-ami Brian Mulroney, qui ne s'est pas privé pour lever la couverture du lit nauséeux dans lequel ils ont tous les deux dormi dans le temps du « beau risque », l'ex-premier ministre du Québec, Lucien Bouchard, a dit attendre de lire le livre insolent avant de commenter. Comme il en a fait une nouvelle coutume, depuis son départ de la vie politique, en 2001, il s'est prévalu d'un certain droit de réserve qui nous laisse évidemment sur notre faim ! Compte tenu de la rudesse de l'attaque du p'tit gars de la Côte-Nord contre son p'tit frère de L'Ascension in the Lake St. John, j'ai de la difficulté à comprendre comment un homme aussi fier, aussi impulsif que Bouchard, puisse rester si distant, sans réaction immédiate ?

Pour les besoins de l'histoire qui s'écrit au-dessus de Nous, retenons que l'ex-premier ministre du Canada, Brian Mulroney, ne mâche ses mots à propos de celui (Lucien Bouchard) qu'il accuse d'être un traître, un menteur et un mystificateur. Dans cette stratosphère où la destinée de bien peu d'entre nous est appelée à voguer, l'attaque porte mortellement sur l'aura. Ça fesse droit dans l'orgueil, comme disait maman ! « Si Bouchard avait démissionné ouvertement sur une question de principe, j'en aurais été attristé, écrit-il. Personne n'est parfait en politique —certainement pas moi, comme ces mémoires le confirment—, et rien n'est éternel. Mais cette « démission » fut une machination complète. Non seulement aucun principe n'était en jeu, mais il avait attribué à ses gestes des motifs nobles, alors que les faits ont révélé exactement le contraire. »

Sorti de la bouche d'un quidam qui écoute TVA ou TQS, on aurait évidemment compris (sic) la noblesse de ce silence princier. Mais, de la bouche d'un ex-premier ministre du Canada, qui plus est son ami d'université et son vieux frère d'armes politique, le coup va assurément s'échouer sur le parvis de l'histoire.

En attendant de donner sa réplique qu'il dit vouloir mesurée, Lucien Bouchard, littéralement encerclé par les journalistes, ne perd pas sa chance et en profite pour demander au bon peuple d'être indulgent à l'égard de son p'tit frère (encore un !), Gérard, co-président de la commission sur les accommodements raisonnables qui aurait dû, dans son antienne d'ouverture, faire montre d'une salutaire modestie. « C'est toujours périlleux d'entrer dans le domaine médiatique, surtout sur un sujet aussi explosif que celui dont l'étude leur est confiée, explique Bouchard. Ce n'est pas tout le monde qui a pris les habitudes de traiter d'un sujets périlleux à répétition, longuement, sans, de temps en temps, déraper un peu. Ça m'est arrivé beaucoup de déraper moi, beaucoup, beaucoup trop... »

Retenons-là celle-là ! Pour l'histoire qu'on aurait bien voulu écrire d'abord quand on était à la première loge du Parlement, et pour celle dont on s'applique à corriger le brouillon avant qu'elle ne soit conclue. Le premier est entrée dans l'histoire du Québec en surfant sur l'émotion nationaliste et ethno-culturelle canadienne-française (en se gardant bien, toutefois, de ne jamais nommer la force de ce peuple fondateur, majoritaire au Québec) ; alors que le second reprend l'affaire par derrière sous prétexte qu'il sera la plume par où l'histoire sera écrite envers et contre tous et sur la foi de la majorité (qui ne peut être que canadienne-française et dont il se fait également pressant devoir de ne jamais évoquer le nom).

En voilà un qui parlait beaucoup et qui se trouve sans voix quand les temps son requis, pendant qu'un autre, qui ne disait rien malgré tout ce qu'il prétendait savoir, n'en perd pas une aujourd'hui pour en dire trop alors que le silence s'impose comme une voix solennelle !

Akakia