Les délires d'Akakia

lundi, janvier 29, 2007

Abitibi-Bowater est née, attachez vos tuques, une nouvelle forêt de chômeurs et de faillites en vue !...

N’ayons pas peur des mots : la haute finance, c’est le vice des hommes qui s’accouple dans le vide de l’État. R.B.

Abitibi-Consolidated et Bowater viennent de fusionner. Résultat : 7 milliards de dollars de dettes que les deux plus grandes assistées sociales du monde se préparent à refiler au régions « ressources ». Plus de 80% de la forêt de résineux du Saguenay–Lac-Saint-Jean et autant des feuillus viennent ainsi donc de passer en une seule main qui est loin d'être propre !

Je vous rappelle qu'aux lendemains de la fusion Abitibi-Price et Stone-Consolidated, en 1997, c'est l'usine de Chandler et toute la Gaspésie qui ont écopé. Des milliers d'emplois ont été la rançon qu'ont dû payer les Québécois —ou plutôt les régionaux— aux coquins de la haute finance mondialiste, et cela, sous l'oeil complice de l'État québécois qui n'a strictement rien fait pour nous. Que pensez-vous qui va arriver, maintenant, aux usines du Saguenay–Lac-Saint-Jean qui viennent de passer d'un vase communicant à un autre, plus grand, plus nauséeux, plus visqueux ?

Qui en paiera le prix : la papeterie de Dolbeau ? d'Alma ? Jonquière ? La pulperie de Saint-Félicien ? Si vous pensiez que l'effondrement de l'industrie forestière était terminé au Québec, attendez de voir les cinq prochaines années. Attachez vos tuques, vous n'avez pas fini de vous désoler.

Incroyable ! Ces multinationales ont désormais tout le jeu de cartes en main : elles ont les chutes d'eau, les centrales, la forêt, les usines. Le Québec est mûr pour un coup de sang social ! À quand la colère ? Lorsque nous serons tous morts de faim !

Vous voulez que je vous dise ! Si j'étais premier ministre du Québec, je donnerais un grand coup de poing sur la table et je récupérerais tous les droits sur la forêt québécoise, les cours d'eau et les centrales. Je n'en raterais aucune. Cela fait, j'établirais un plan de restructuration de ce cadavre économique en fonction des besoins des Québécois qui en vivent et de ce qui nous reste ; pas en fonction de l'industrie qui se prépare à prendre ce qui reste.

Cette débilité qui a commencé en 1810, dans le plus fort des guerres napoléoniennes doit prendre fin. Les citoyens des régions ressources doivent absolument cesser de croire aux mensonges des multinationales, de Chevrette et de ces gouvernements qui, l'un après l'autre, naviguent dans ce dossier crucial, les yeux fermés, démâté et sans gouvernail. Il faut que ça cesse cette rapine néolibérale et mondialiste !

Dans mon livre publié en 2004 sur l'industrie forestière, en concluant sur la fusion Abitibi-Price de 1974, j'écrivais :

« Voilà donc les faits, à ce tournant de nos annales ! Les faits soumis au lecteur, pour lui permettre d’évaluer la qualité des acteurs qui ont pris part à ce jeu d’initiés et pour tenter de mesurer la souffrance des populations entières qui en ont été les dupes et les victimes. Voilà les faits tels que ravis à l’écheveau de l’oubli et au prisme temporel. Les faits simples, purs, durs et crus. Les faits reportés avec le souci souverain de comprendre, de rendre justice à la vérité historique, témoigner, instruire et corriger si possible. Habitués de négocier avec une entreprise de type familial (la Compagnie Price), les Saguenéens et les Jeannois devront désormais s’habituer à composer avec une multinationale sans racines, insensible à leurs douleurs, motivée uniquement par la quête de profits —qui leur échappent— et dirigée par des gérants corporatifs beaucoup moins soucieux des besoins régionaux et peu enclins à respecter les acquis sociaux récupérés de peine et de misère, au cours d’une histoire qui aura duré 136 ans —de 1838 à 1974— entre la population saguenéenne et la Maison Price.

Posons-nous simplement la question : Trente ans après le fait, en ce début de millénaire, que reste-t-il, pour nous et pour notre suite, des usines de Jonquière, Kénogami, Alma, Port-Alfred ? Que reste-t-il de ces lambeaux d’usines et de cette forêt saignée à blanc, laissées à l’abandon par des spéculateurs boursiers, des pilleurs de peuple, des détrousseurs de grand chemin ? Où en est la population régionale dans sa quête du bonheur ? Trois questions qui doivent interpeler les consciences. Toutes les consciences ! Pour ma part, le vrai résultat, celui faisant depuis lors que le Saguenay–Lac-Saint-Jean soit contraint de produire plus de dividendes à des profiteurs étrangers avec plus de bois et plus de sueur pétris dans les liqueurs des usines surannées, m’indique que ces gains se sont faits sur le dos de sa population et que la recherche du bonheur qui est le propre de toute société en quête d’une destinée, société si primitive soit-elle, n’a pas compté le moins du monde dans l’esprit de ceux qui se sont échangé nos moyens de production et nos ressources naturelles pour satisfaire, celui-ci son ego, celui-là son avarice, cet autre pour compenser son vide dans la satisfaction d’un fantasme.

On ne peut observer l’histoire qui nous soumet sans la soumettre à son tour à un regard propre. C’est le propre des esprits libres. N’ayons pas peur des mots : la haute finance, c’est le vice des hommes qui s’accouple dans le vide de l’État. Appelé à se pencher sur les conséquences perverses de la fusion Abitibi-Price et sur l’épidémie de fermetures qui va frapper après coup les usines de pâtes et papiers du Québec, le ministère des Terres et Forêts conclura trois ans plus tard —dans les termes d’une commission parlementaire formée en 1977— que la prise de contrôle du groupe Abitibi a contribué à « affaiblir la concurrence dans cette industrie » et qu’elle a réussi, par voie de conséquence, à limiter considérablement les investissements dans ce secteur d’activités. Mais il ne suffit pas à l’État de constater le méfait ; encore lui aurait-il fallu corriger. Et corriger pour la peine ! Car loin de s’arrêter, notre déchéance se poursuit.

Les faits sont des témoins tenaces qui relèvent de l’absolu. Dans les années qui vont suivre la formation du holding Abitibi-Price, les anciennes usines Price et l’industrie forestière sagamienne seront soumises aux seules lois du libéralisme économique et du marché international, et devront faire les frais de la vénalité des hommes. Ces usines, qui vivent sur du temps emprunté, deviendront alors, nous allons y revenir forcément dans notre troisième et dernière partie qui s’ouvre sur l’année 1975, les grands otages d’une véritable révolution socio-économique ponctuée de nouvelles prises de contrôles, d’arrivées de nouveaux compétiteurs, de ventes et de fermetures qui vont résulter à des milliers de mises à pied qui rejoindront, ad vitam æternam, la masse de plus en plus imposante de désœuvrés, d’assistés sociaux et de laissés-pour-compte d’une société déréglée, déboussolée et dépouillée de tous ses biens au nom de principes qui ne sont pas les siens et de rouages qui lui échappent en totalité.



Cela fait maintenant 32 ans ! Et nous n'avons encore rien appris de la leçon. Sommes-nous carrément idiots, ou plus simplement morts ?

Russel Bouchard
Auteur, « Annales de l'Industrie forestière au Saguenay—Lac-Saint–Jean (1945-2000) », Chicoutimi, 2004, 520 pages.

dimanche, janvier 28, 2007

Frisson médiatique !!!

Les médias, « une bombe puissante susceptible d'exploser à tout moment au visage de quiconque » — C. Néron


Le monde n'étant pas parfait, qui pourrait prendre le risque de critiquer cet éditorial de Carol Néron, qui titre, ce dimanche, en page A-10, « Médias : attention, à manier avec soin ! » Devant la menace que représente un tel commentaire, est-il encore sainement possible d'oser critiquer celui qui la commet ?

Ainsi, quand l'éditorialiste de la Maison de la très puissante Presse Gesca écrit : « Le « Doc » Mailloux, Patrick Roy, Mario Pelchat et, même l'un des co-propriétaires des Sags, Pierre Cardinal, dit « Cardin », ont tous goûté à la médecine de cheval des médias ces jours derniers » ; quand il écrit cela, il donne un compte rendu succinct et on ne peut plus exact de ce qui fut effectivement le cas.

Quand l'éditorialiste poursuit son commentaire en disant que « Les épinglés ne la trouvent pas drôle, [et que] leurs proches sont confrontés eux aussi au même chemin de croix ». Quand il poursuit de la sorte, l'éditorialiste caricature ou plutôt banalise à sa plus simple expression une conséquence extrême, parfois néfaste, de tout le ravage que peuvent faire les médias, quand le besoin de hausser la courbe des ventes en kiosques les surprend. Gare à celui, donc, qui aura le malheur d'être là au mauvais moment ! Surtout dans une période de l'année, fin janvier par exemple, où la toute grande presse sensationnaliste a bien peu de choses à se mettre sous la canine.

Et quand il conclut, sans gravité aucune, que ce n'est là que « la rançon de la célébrité, modeste ou immense », et que « l'idée fondamentale consiste, cependant, pour quiconque, aujourd'hui, est tenté d'utiliser les médias pour se bâtir une réputation, de bien comprendre et accepter qu'il manipule une bombe puissante susceptible de lui exploser à tout moment au visage. Et que les dommages collatéraux, en particulier du côté de la famille, risquent, eux aussi, de se révéler impossibles à gérer ! » Quand il conclut de la sorte en brassant les « bombes » dont il peut disposer séance tenante contre quiconque (sauf contre lui, ses amis, sa famille, ses patrons et ses collègues) ; quand il met en cause l'intégrité même de la famille d'une personnalité publique, l'éditorialiste nous fait bien comprendre que c'est bel et bien lui qui a le détonateur en main. Il exprime par là, et c'est là que le propos m'apparaît des plus inquiétants, tout le pouvoir qu'on lui a confié en des lieux hors d'atteinte des suppliciés qu'il offre en pâture au public selon ses humeurs, besoins et intérêts.

Voilà, à mon avis, une forme de violence qui mérite d'être dénoncée malgré les risques qui nous encourent. Voilà ce qui mériterait d'être soumis à l'attention du public, pour un solide questionnement social et politique, ne serait-ce que pour voir si l'information et le public y trouvent vraiment leur intérêt.

Ce qui inquiète, ce ne sont pas les élucubrations des uns ou des autres, mais bien le doigt qui est dans l'anneau de la goupille de la « bombe » médiatique et qui peut faiblir à tout moment... Ce qui inquiète, c'est cet énorme pouvoir de la presse ; c'est cette formidable capacité de détruire l'image qu'ils ont eux-mêmes créée pour alimenter leurs propres pouvoirs ; c'est cette manière de prendre des familles en otages, des familles qui, aureste sont habituellement totalement innocentes ; c'est cet ultime châtiment qui pèse sur la tête de celui-ci ou de celle-là qui aura, par malheur ou par mégarde, mis le pied sur une mine trop finement dissimulée par un politique, un patron, un journaliste ou un paparazzi.

Dans ce papier, qui fait bien sentir la menace perpétuelle pesant au-dessus de nos têtes, il n'y a pas l'expression d'une seule prudence, d'une seule compassion, d'un seul sens de la retenue, d'un seul respect et de tous les devoirs auxquels sont tenus pourtant les médias, les journalistes et les éditorialistes. Rendu à ce niveau d'impudence, Dieu n'a plus aucun pouvoir. Ou plutôt il n'est plus là ; il a tout simplement été remplacé par le Seigneur Média qui peut fabriquer, embellir et démolir une image à sa guise...

Akakia

vendredi, janvier 26, 2007

Le Saguenay–Lac-Saint-Jean, encore une fois la dupe des vendeux de pays !

Promue, bien malgré elle, « région limitrophe », le Saguenay–Lac-Saint-Jean, cocue contente, se fait encore une fois la dupe des vendeux de pays !

Grâce au projet de construction de la centrale Eastmain-1-A , et aux os de ragoût qui vont avec, le Saguenay–Lac-Saint-Jean vient d'être promu, écoutez-là bien celle-là... « région limitrophe » ! Avec l'Abitibi–Témiscamingue et le Nord-Québécois, le SLSJ est ainsi donc devenu en titre, en sous-titres et par ses sous-fifres, la troisième région au Québec à se voir ainsi accordée, par le gouvernement néo-libéral de Charest, une telle reconnaissance. Si elle n'a pas fait grand bruit à Québec et à Montréal, l'affaire vient d'être annoncée, tambours battant chez nous, par M. Serge Simard, président de la « Conférence Régionale des Élus (la CRÉ, qui veut également dire « cré Serge va ! »), et par M. Réjean Laforest, président du « Comité de Maximisation des Retombées Économiques Régionales du Saguenay—Lac-Saint-Jean », ce qui inclut la tiraille et le croquant qui tombent de la grande tablée des exploitants hydro-québécois, nationaux et étrangers.

Aux dires des promoteurs et des sous-développeurs régionaux, le projet Eastmain-1-A, pharaonique entre tous, est de l'ordre de 5 G$ et il devrait permettre aux trois « régions limitrophes » (sic !) de récolter, tenez-vous bien, 188 M$ en retombées économiques potentielles de ce fameux salmigondis à la néo-québécoise. Généreux programme ! Trois pour cent et quelques miettes de retombées potentielles, pour les trois régions directement impliquées ! Tout un cadeau de l'Hydro ! Un os de ragoût avec bien peu de moelle somme toute, un droit d'aînesse qui fait déjà saliver nombre d'affairistes québécois qui, manifestement, ont vraiment hâte de s'y mettre la langue et y donner de la canine avant d'aller se repaître dans leurs condos en Floride ou en République-Dominicaine.

Après avoir été une « région périphérique » (à Montréal), et après avoir été une « région ressources » (au profit de Montréal et des étrangers), nous voilà donc devenue, par une autre formidable tournure sémantique, une... « région limitrophe » ! Selon ce qu'on en dit, cela devrait nous satisfaire pour la suite et nous en boucher un bon coin jusqu'au prochain détournement de rivières qui n'ira pas sans un autre détournement de sens.

Tout ce massacre environnemental et cette menace écologique pour continuer d'être le rien d'un tout dans le tout Québec. « Région périphérique » ! « région ressources » !! « région limitrophe » !!! Pour une fois dans notre triste vie de colonisés, pourrait-on au moins cesser de nous prendre pour des vessies ? Ne serait-il pas plus simple, plus juste et plus équitable de faire du Saguenay–Lac-Saint-Jean une « région » tout court ? Une région qui n'aurait pas à faire la pute dans les petites ruelles du Parlement pour pouvoir retirer les miettes tombées de la table et pour pouvoir, enfin, retirer une plus juste part de ce qu'elle a pourtant droit en fonction d'elle-même : la dignité et une juste prospérité...

Russel Bouchard
26 janvier 2007

mercredi, janvier 24, 2007

L'affaire Ségolène Royal – Où l'art de se mettre les souliers dans la bouche ! PRISE 2

Précision d'usage :
M. Salon m'ayant informé qu'il n'était plus ambassadeur depuis plusieurs années et qu'il a fait sa critique dans le cadre des préparatifs du 400 e anniversaire de Québec, je rectifie donc le premier paragraphe—et uniquement lui— pour soulager ce monsieur de la fonction d'ambassadeur qu'il dit ne plus avoir, et pour rétablir la base de mon commentaire sur l'expresse citation de M. Bergeron. Ce qui n'altère en rien mes objections et ma prise de position face à ce que je qualifie toujours d'ingérence étrangère dans un pays indépendant et démocratique.

Comprenons que Mme Royal s'est royalement fourvoyée dans son propos adressé en présence de M. Boisclair et devant les caméras (ce qu'elle aime les caméras et les miroirs cette belle dame !), et je suis toujours d'avis que M. Salon n'aurait pas dû ajouter son sel républicain dans la grande marmite des affaires du Québec et du Canada. Je comprends que la présence de la France dans les fêtes à venir est importante pour la France et pour le Québec, mais cette participation oblige plus qu'elle ne permet...

Russel Bouchard


L'affaire Ségolène Royal – Où l'art de se mettre les souliers dans la bouche ! PRISE 2

Dans un courriel largement distribué et très passionné, un ami montréalais, indépendantiste et « grand patriote », M. Jacques Bergeron, nous informe, avec un plaisir non dissimulé, que « L'Ambassadeur Albert Salon nous fait part de son indigantion devant les propos du 1er ministre du Canada Stephen Harper à la suite du propos de Mme Royal sur le Québec. ». Singlant à l'endroit du premier ministre canadien selon ce qui ressort du papier sybillin de M. Bergeron, notre correspondant de France aurait, semble-t-il, fustigé le Canada et son Parlement (et conséquemment le BLOQ !) pour l'intervention en Afghanistan, ce qui « est beaucoup plus «grave» que le «propos» de Mme Royal qui se permet d'émettre un commentaire «positif» sur le Québec, pays occupé par le Canada anglais depuis plusde 350 années »

En nous saluant « très patriotiquement », M. Bergeron écrit encore « très patriotiquement » : « Il faut reconnaître que ces gens ont pu intervenir dans la vie de notre pays, le Québec, grâce à l'obligeance «!» de collaborateurs du genre de Stéphane Dion, de Jean Chrétien, de Lucienne Robillard et de nombreuses autres personnes qu'il m'est impossible de nommer ici, et des nombreux scandales qui jonchent le saint lieu du Gouvernement d'Ottawa et de son sénat. »

Permettez-moi de ne pas être d'accord sur le fond (l'ingérence étrangère dans un pays souverain) et de rappeler qu'on ne devrait jamais confondre les principes fondamentaux qui nous régissent avec les politiciens qui nous horripilent (Dion et Harper étant évidemment de ceux-là) !

Je suis d'avis que Mme Ségolène Royal a commis là une erreur de jugement qui n'aide en rien la situation du Québec toutes options politiques confondues, et je suis tout autant d'avis que M. Salon, que je reconnais pourtant être un type intelligent, aurait dû faire l'effort —difficile je le comprends pour un Français— de se la « farmer » ! C'est carrément de l'ingérence étrangère et pour l'une et pour l'autre. M. Boisclair ne devrait pas pavoiser ; incapable de résister au chant des caméras, il a agi comme un gamin dans une cour d'école et non pas comme un futur chef d'État qui devra, si cela se produit comme il l'espère, rudement négocier notre indépendance face à une France qui a une longue histoire coloniale derrière elle.

Imaginez seulement le coup que recevrait le Québec en quête de son indépendance, si le Canada, avec tout le poids qu'il détient sur l'échiquier mondial, se mettait à faire parler les pays souverains —dont le président actuel de la France— en faveur du fédéralisme.

Soyez sérieux tout de même et tâchez de voir au-delà des émotions partisanes. Le principe que Mme Ségolène Royal a heurté, c'est réellement celui de la non-ingérance d'un pays étranger dans les affaires d'un état indépendant, libre et démocratique. C'est, à mon point de vue, totalement inacceptable ! Et le plus grand perdant n'est pas le Canada mais le Québec de M. Boisclair qui ressemble un peu à un enfant à qui on demande de choisir son tuteur : la France ? ou le Canada ?

Charybde ou Scylla ? Se sauver d'un monstre pour sombrer dans un autre, non merci pour moi ! Les maîtres y en a marre !!! D ans ces conditions, je préfère encore l'indépendance du Saguenay–Lac-Saint-Jean si ce n'est celle de la Boréalie, métisse et canadienne-française d'abord, ouverte aux autres après que cela soit clairement établi et accepté...

Russel Bouchard

dimanche, janvier 21, 2007

R.I.P. † La nation canadienne-française n’existe plus † On fait quoi maintenant ?...

Ce pamphlet a été rédigé et publié le 29 janvier 2000 à une trentaine d'exemplaires parce que les journaux n'en voulaient pas — et surtout pas Le Devoir qui n'en n'avait que pour les « lucides » de la Lucide époque ! Je n'étais pas de ce nombre et n'entendais pas me faire moudre dans la très « civique » moulange franco-québécoise.

Ce sera donc le dernier de trois pamphlets que je vous offre pour souligner le cinquième aniversaire du départ de notre Lucide libérateur et de sa glorieuse élite ! Bien qu'il m'en reste encore une bonne provision dans mes dossiers, je suis toujours aussi farouchement d'avis, qu'à quelque part et parmi nous, des gens ont eu intérêt et ont tout fait pour avilir la mémoire des Canadiens français, celle de ces pères et de ces mères qui ont défriché et abreuvé de leurs ueurs la terre sacrée de ce pays.

Je n'acceptais pas alors qu'il en fut ainsi et je n'accepte toujours pas aujourd'hui de ne plus être rien dans ce pays. Si vous ne vous souvenez plus, MOI ! JE ME SOUVIENS !...


La nation canadienne-française n’existe plus, l’savais-tu p’tit Canayen ?
faut se faire modernité
!...


Russel Bouchard

« Depuis le commencement dudict fleuve jusques à Hochelaga y a troys cens lieues et plus et est le commencement d’icelluy à la ripviere qui vient du Saguenay, laquelle sort d’entre haultes montaignes et entre dedans ledict fleuve auparavant que arryver à la province de Canada [de la bande] devers le nort et [est] icelle ripviere fort parfonde estroicte et fort dangereuse a naviguer.»

«Apres ladicte ripviere [du Saguenay], est la prouvynce de Canada où il y a plusieurs peuples par villaiges non cloz [dont les Canadiens qui vivent à Hochelaga].» (Jacques Cartier, Relation, 1545)



Depuis le dernier printemps, les élites nationaleuses du Québec (Bouchard & Bouchart, Bouthillier, Facal et consorts) appuyées dans leur baroud idéologique par les grands prêtres du journal Le Devoir, s’appliquent à re-«Penser la Nation». «Le Canadien français est mort !», incantent-ils du haut de leur chaire, «vive le Franco-québécois de la rose des vents !» La plus belle imposture sémiologique depuis la fameuse Conquête qui a fait basculer dans la géhenne élisabéthaine, Montréal (la nécropole) et Québec (la servile capitale) ! Au nom de la nouvelle vertu fleurdelisée et des nouveaux curés qui nous sermonnent, le schisme culturel péquiste s’applique à déboulonner les derniers héros du passé. —L’histoire du Québec a besoin d’un nouveau lifting p’tit Canayen du Saguenay, le Québec doit se faire modernité!...

Jamais n’aura-t-on vu, de mémoire d’hommes, de femmes et d’archives, un tel ramassis de geignards, d’idéologues et de démagogues arraisonner la conscience du Québec profond, réquisitionner la vérité et s’appliquer avec autant de «ruse» et de fourberie à refaçonner l’âme du «pays». Leurs derniers écrits en témoignent : ces gens se sont donné comme mission de «déconstruire» la mémoire, de la nettoyer de sa substance profonde et de l’infecter par de nouveaux symboles mondialistes. L’histoire a été injuste à notre égard et nous avons soif de pouvoir, rechignent-ils ! Qu’à cela ne tienne pardi, brûlons les livres qui témoignent de leurs souffrances et de leurs rêves, «déconstruisons» les vieux guides obsolètes, dénaturons par eux la conscience commune et forgeons-nous en une nouvelle. —Faut plus rêver de vérité p’tit Canayen du Saguenay, le Québec doit se faire modernité !...

Peu importe la réalité qui nous assassine, il faudra bien qu’elle se fasse discrète pour la Cause. Le Québec a rendez-vous avec l’Histoire. Quoi que tu dises, quoi que tu penses, le tout Montréal doit se sentir le grand héros du chapitre qui s’écrit. Tous ces gens, frères de lit et d’adoption qui représentent 50% du poids démographique du Québec, l’aurais-tu oublié, décident à eux seuls du sort de la nation et disposent du 2% des «votes ethniques» (!) qui nous ont faits si cruellement défaut lors du référendum de 1995. Tu dois t’adapter à l’insulaire même si, dans le «pays» où tu vis, souffres et meurs (le pays du Saguenay), 98,5% des citoyens sont des Canadiens français de souche et de langue et n’ont plus rien en commun avec le melting pot montréaliste, ce lourd boulet qu’on te demande de traîner jusqu’à la nuit des temps. Quoi que tu fasses, indépendance ou pas, ta docilité proverbiale aidant, tu seras toujours le Montagnais de quelqu’un. —Faut plus rêver d’égalité et de fraternité p’tit Canayen du Saguenay, le Québec doit se faire modernité !...

Tasse-toé le porteur d’eau avec tes raquettes et ta ceinture fléchée, v’la l’autre de la grande île qui s’amène avec son taxi et son beau char chromé. T’as beau être ici depuis 500 ans et savoir faire les souliers de boeuf, ton nom est personne, on te sacre Franco-québécois. Que tu le veuilles ou non, t’es maintenant au service de ta nécropole, c’est Acchab et Facal qui te l’disent ! Désormais p’tit gars p’tite fille, t’as plus qu’un présent c’est la nouvelle norme, et il ne t’appartient plus de le critiquer... T’as une langue, certes, c’est ce qui nous permet de te faire discours, mais pour ton passé et pour tes rêves donne nous un peu de temps, l’archevêque et son bedeau te les réécrivent sur l’heure et t’en forgent de nouveaux. Tu vis sur un territoire que tu as toujours cru tien, mais prends bien note désormais qu’il ne t’appartient plus ! Métropole, SSJB, SNQ, PQ, Bouchard want you ! Et en attendant d’être reconnu comme citoyen de ce pays qu’on te découpe, prends la place qu’on t’assigne dans le discours, fais la queue à la soupe du jour, et bêche sans jamais lever la tête si t’en as la chance ! —Faut plus rêver de liberté et encore moins de prospérité p’tit Canayen du Saguenay, le Québec doit se faire modernité !...

Vérité, égalité, fraternité, liberté, prospérité l’savais-tu le Canayen errant, ne sont plus désormais que figure de l’esprit ? Qu’importe les besoins du Québec profond, ses rêves et son identité propre, de gré ou de force, foi de Lucien, ce sera un pays, une île, une ville, un stade, un hôpital universitaire, un métro et une bibliothèque nationale... même si tu n’y mettras jamais les pieds. Désormais, il n’y a plus qu’une seule voix, une seule loi, une seule avenue ; celle de la propagande, de la foi envers la Cause dénaturée et souillée, de la servitude animale. C’est l’histoire du Québec qui s’écrit. La nation est sous l’influence de quelques Tartufes et lettrés Merlins, la soumission de l’esprit est élevée au rang de vertu. —Coche le «Oui» et rentre dans le rang p’tite canaille du Saguenay, faut te faire modernité!...

Pays du Saguenay
29 janvier 2000

samedi, janvier 20, 2007

Cinq ans déjà, qu'il nous a quittés le Lucide !!! Et le Québec ne s'est toujours pas écroulé...

C'était le 11 janvier 2001

Fiers représentants d’une «race» en voie d’extinction, les ex ministres Paul Bégin, Linda Goupil, Sylvain Simard et Jacques Brassard échangeant dignement —et avec une égale tristesse (!)—sur l’acuité de la démission surprise de leur chef Lucien Bouchard !..
Photo : Jacques Nadeau, Le Devoir, 12 janvier 2001.


Glorieuse élite !

par
Russel Bouchard
21 janvier 2001

—Dans la foulée de ce qu’il convient désormais d’appeler
L’Affaire-Michaud—

Dieu du ciel qu’il s’en est lancé des épithètes et léché des godasses depuis la démission catastrophe de Lucien Bouchard, le 11 janvier. Dernier acte d’une imposture moliéresque et d’un pitoyable consommé ! De ma vie, je n’oublierai jamais la photo placardée à la une du journal Le Devoir du jour d’après (the day after !), où l’on voit trois ministres péquistes qui s’épanchent mutuellement, bras dessus bras dessous, sous le regard mi-figue mi-raisin (mais plus raisin que figue !) du ministre Jacques Brassard. Triste spectacle, en effet, que celui de ces pleureuses romaines totalement effondrées qui implorent le ridicule devant les caméras pour ne pas mourir de honte ! Et tout ce cirque, burlesque, sous prétexte d’une déclaration soi-disant xénophobe échappée à la toute fin du discours critiquable —mais combien instinctif— d’un Canadien français de banlieue qui aurait osé dire tout haut ce que bien des Québécois de souche pensent tout bas.

Voilà pour l’image, la photo qui m’aura le plus marqué dans les aléas de cette bien nébuleuse démission, où tout ce qui a été dit à ce jour par le grand rabbin de l’Assemblée nationale en train de rendre sa chasuble, n’avait, sans aucun doute, rien à voir avec la vérité toute nue qu’il cachait sous sa calotte. Et à défaut de faire partie d’un «peuple sans histoire» (dixit Durham), les Québécois de souche savent bien qu’ils peuvent, à tout le moins et en tout temps, compter sur des ministres au coeur tendre (snif! snif!) capables de s’émouvoir du mauvais sort qui les frappe à chaque détour de l’histoire. Glorieuse élite ! Vite, qu’on donne le prix Pulitzer à ce brave photographe qui a eu le génie de croquer sur le vif une scène de la vie quotidienne au salon du peuple, alors que le tout Québec (un bien grand tout, le Québec !) s’émeut, à en perdre haleine et le sommeil, du départ catastrophé d’un père qui vient de découvrir sa famille et qui a décidé de prendre une retraite anticipée sous prétexte que mémé et les gamins ont un pressant besoin de sa présence.

vendredi, janvier 19, 2007

Accommodement raisonnable — Voilà ce qui arrive quand les clercs et les chefs trahissent leur mission et le peuple !

Il est beaucoup question ces jours-ci des dérives de « l'accommodement raisonnable ». Hier, à la télé francophone, M. Bernard Landry, s'insurgeait avec effusion contre cette inacceptable dérive et fustigeait tous les chefs d'aujourd'hui pour tant de laxisme.

Curieux comment les gens ont la mémoire courte ! Je pourrais vous sortir profusions de textes et déclarations solennelles de cet ex-premier ministre qui, lorsqu'il a investi la première chaise au Parlement du Québec, parlait allègrement en faisant toutes les liaisons possibles et impossibles, en vantant les mérites, d'une nation « civique », « inclusive », « communautaire » et des plus généreuses pour l'arrivant qu'il n'avait de cesse de flatter dans le bon sens du poil.

C'était le temps des prophètes de « la nation québécoise au futur et des sans racines », une nation franco-québécoise, inodore, incolore, indolore et mortellement soumise au diktat du dernier réfugié qu'il ne fallait pas heurter. Rappelez-vous. Se dire Canadiens français, l'un des peuples fondateurs du Québec, était alors considéré comme une déclaration raciste, dégradante et rétrograde. C'était le temps du beau risque de l'avant, du pendant et de l'après Lucien Bouchard. Le temps où tous les délires sémantiques étaient permis pourvu que nous cachions sous notre bonnasserie les fibres profondes du vrai pays, et « brûlions au feu de la St-Jean nos racines françaises» et nos ceintures fléchées pour ne pas heurter tous les Luke Mervil du Québec.

Vous avez déjà oublié ? Moi pas ! Voyez le texte qui suit. Il date du 21 janvier 2001. Aucun journal, cette semaine-là, n'avait voulu le publier. J'ai dû le faire moi-même, à quelques dizaines d'exemplaires. Permettez que je vous rappelle...

Akakia



«Une race trahie par ses chefs» !...

par
Russel Bouchard

—Dans la foulée de ce qu’il convient désormais d’appeler
L’Affaire-Michaud—

« Le fondement d’un État c’est le peuple ; si ce fondement
n’est que de terre et de boue, l’État ne peut durer longtemps

Louis XVI, Oeuvres

De la somme des écrits qui s’empilent déjà dans notre jardin des oubliettes comme feuilles d’automne précoce, je retiendrai du fracas médiatique qui a suivi la démission de Lucien Bouchard, celui d’un certain Michel Seymour (?), un illustre inconnu du département de philosophie de l’Université de Montréal qui, d’un grand coup de langue donné le 16 janvier dans la page des «Idées» du Devoir, parle d’un... «héritage impressionnant» (sic) en évoquant avec beaucoup d’émotion des retombées de son règne subitement abrégé. Le bienheureux quidam n’y va pas par quatre chemins quand il s’exprime sur l’épineuse question nationale. Mais qui osera le lui reprocher, à lui, qu’il crache dans la soupe, et qui osera me tenir rigueur, à moi, de crier qu’il y en a marre de se tasser dans le coin de la bécosse pour que la visite qui entend rester se sente à l’aise dans le salon bleu de la maison ?! Parmi les défis à surmonter avant d’atteindre «l’idéal social-démocrate», plaide ainsi notre concitoyen philosophe, «il faudra également poursuivre l’implantation d’un nationalisme civique au Québec et s’affranchir une fois pour toutes du nationalisme exclusivement axé sur la majorité canadienne-française». Racistes, vous dites ?!

Nous y voilà donc ! Comme en 1791 !! Comme en 1840 !!! Une conscience —canadienne-française de préférence— à exorciser de cette Terre de nos aïeux.

On aura évidemment compris par cet autre coup de pied de l’âne qu’on peut être tout dans ce «pays» en devenir, qu’on peut se réclamer d’une impénétrable et insondable fratrie migratrice, qu’on peut être de l’archiconfrérie des évadés de l’île du Croissant Vermeil venue planter leur pagode à deux pas de l’Assemblée nationale, mais jamais, jamais au grand jamais peut-on se réclamer de la nation canadienne-française, l’hôtesse bienveillante et moribonde par qui passe le scandale. Par un curieux retour de l’histoire, et au fil d’un combat sensé libérer tout un peuple, les termes identitaires («race», «ethnie», «Canadien-français») sont devenus tabous. Même que simplement les évoquer ou référer à la mémoire de Groulx pour tenter d’exprimer sa pensée, est devenu suspect aux yeux de ceux et celles des nôtres qui ont reçu mission de nous amener, envers et contre tous, à la Terre Promise dont les contours brumeux ont été redessinés à partir de la nouvelle réalité démographique pluri-ethnique de Montréal ! Franco-québécois, qu’il disait l’idéologue réductionniste, le frère de l’autre, pour un peuple bonasse extirpé de son histoire et qui a accepté de se laisser déshabiller de sa mémoire sans s’y objecter !

Me voilà ainsi —et bien contre moi— devenu membre d’une communauté culturelle quelconque perdue au coeur d’une quelconque nation franco-québécoise, elle-même perdue à l’extérieur du trou de beigne d’une grande île avec laquelle on (ce qui m’exclut) entend bien me faire pays sans tenir compte de l’image que je m’en fais et des rêves que je nourris ! Comme acte de reddition et geste d’assimilation, impossible de faire mieux ! Une mouche dans le lait, me voilà donc devenue. Suicide collectif autoprogrammé (voir absolument le graphique ci-joint) par nos chefs assistés de L’État qui nous a lâchement et doublement trahi sous l’oeil naïf de l’élite intellectuelle de cette «nation», la mienne, est-ce possible ! qui n’en finit plus de s’humilier et de pourrir sous leur mortifiante défection et leur insoutenable concert de gémissements. Je crois comprendre aujourd’hui la détresse profonde de Groulx lorsqu’il s’abandonna à ses déceptions et dénonça sans poil à la patte, dans sa conférence prononcée au Monument national de Montréal, le 29 novembre 1943, «ce spectacle déprimant des lâchages et des reniements», et cette «procession funèbres de ces chiens crevés qui s’en vont au fil de l’eau, symbole poignant d’une race trahie par ses chefs».

C’est Durham qui doit être content !...

«On ne peut guère concevoir de nationalité plus dépourvue de tout ce qui peut vivifier et élever un peuple que celle des descendants des Français dans le Bas-Canada, du fait qu’ils ont conservé leur langue et leurs coutumes particulières. C’est un peuple sans histoire et sans littérature.» Lord Durham, 1839.

Et si on demandait simplement à nos partenaires juifs (croyez bien que j’envie leur solidarité indéfectible) de la «nation civique» franco-québécoise en devenir qui se sont insurgés au son des trompettes de Jérichos contre la déclaration de Monsieur Michaud, s’ils font partie d’une nation «ethnique», «civique» ou «culturelle», que répondraient-ils, eux ? M’est-il permis d’anticiper, de croire et de dire, sans détour aucun et sans devoir pour autant passer sous les fourches caudines de l’Assemblée nationale et sous un orage de crachats lancés par un commando de zélotes enragés, que chacun d’eux s’empresserait de rétorquer à bon droit qu’ils sont un, solidaires et indivisibles sur l’essentiel (ce qui est respectable comme point de vue), qu’ils savent bien d’expérience, eux, que la nation menacée —car c’est bien de la nation canadienne-française menacée de disparition dont il est toujours question dans le projet nationaliste, n’est-ce pas ?— n’existe plus du moment où elle perd un seul de ces trois attributs (qui sont, en d’autres mots, le sentiment d’appartenance à un groupe enraciné dans le temps et dans l’espace, une fraternité dessinée autour d’une conscience collective, un rêve commun et un bagage culturel particulier). Le reste, la cohabitation multi-ethnique —et «inclusive», cela va de soi, nul besoin de le préciser— que nous imposent l’histoire et une démographie canadienne-française dramatiquement défavorable (et dont le vocable a été, soit dit en passant, totalement éludé, hier, dans le discours à la chefferie de M. Landry), fait partie prenante du contrat social qui devrait dessiner, en principe, les contours de l’État-nation avec les communautés d’apport —rien d’autres ! «Le génie d’un peuple», écrivait encore Groulx dans une causerie prononcée le 13 septembre 1936, «n’est pas quelque chose de figé, de statique ; c’est une réalité essentiellement dynamique, en puissance d’évolution et d’enrichissement indéfinis.»

Cela dit, alors pourquoi, par un curieux dérapage de l’histoire, les Canadiens-français, l’ethnie fondatrice qui représente encore la majorité des «citoyens» de ce «pays», doivent-ils cesser de se réclamer d’une fraternité particulière partageant le même drame historique, doivent-ils accepter qu’on dénature leur mémoire et leur rêve communs, doivent-ils se résoudre à n’être plus qu’une vulgaire et anachronique composante culturelle perdue dans une quelconque nation franco-québécoise qui ressemble à tout sauf à moi, l’oublié du grand partage fleurdelisé, lui-même perdu sur sa banquise, à 500 km au nord de la grande île ? Suis-je coupable d’hérésie et punissable sans sommation, si je soutiens que le respect qu’on exige de l’un, implique nécessairement le respect que ce dernier entend recevoir de l’autre ?

Mais au fait et vu que nous y sommes, que reste-t-il du rêve de survie de mon peuple, à partir de ce nouveau canon évangélique nihiliste lancé dans la mêlée de la dernière et historique déroute référendaire ? Oui ! que reste-t-il ? «Si je vous ai bien compris» comme disait l’autre, si j’ai bien assimilé l’objet du débat et des raisons qui ont motivé l’abdication du Prince, les quelque 280 000 Canadiens-français de mon «pays» à moi (le Saguenay—Lac-Saint-Jean) qui forment encore 98,5% de notre population à Nous, sont tenus d’accepter de disparaître purement et simplement dans un tout dénaturé, inodore, incolore et montréalisé (les Franco-québécois), ils ne peuvent plus évoquer les souffrances et les espérances qui jalonnent les grands chapitres de leur histoire, pour que puisse enfin se réaliser le projet politique récupéré et dessiné depuis peu, par un groupe d’initiés, autour du melting-pot montréalais —sans égard à la réalité ethnique, géographique, civique, naturelle et culturelle de la «périphérie» (sic) assassinée par les dirigeants de sa capitale et de sa métropole ?

Sous sa forme nouvelle, mondialisation de l’économie et uniformisation des cultures aidant, la société québécoise s’est ainsi métamorphosée en un corps pervers qui a oublié sa seule raison d’être, l’entraide. Elle est devenue source des inégalités qui la désolidarisent, moteur de la pauvreté qui l’avilit, ferment des malheurs qui la divisent et des souffrances qui l’affligent. Et l’occasion est décidément trop belle pour ne pas vous rappeler que la première loi sociale devant avoir préséance sur toute autre et en tout temps, est celle qui garantit à tous les membres —individuels et régionaux— de la société le droit et les moyens d’exister. Quelle honte ce régime, pour l’avoir ainsi oubliée ! Quelle déception ce peuple, pour s’en être écartée !...

Russel Bouchard

dimanche, janvier 14, 2007

Quand les poissons se bidonnent !

Le fjord Saguenay, à quatre jours d'un record historique, n'a toujours pas enfilé sa jaquette de glace — Quand les poissons se bidonnent !

« Pour donner une chance aux sébastes de se refaire une santé, j'espère que les glaces n'atteindront pas les 12 pouces réglementaires nécessaires. Quand l'homme n'a pas le courage de prendre les décisions qui s'imposent pour protéger la faune, la nature sans charge. » Tiré d'un texte du chroniqueur sportif Roger Blackburn, « Les glaces figent à la Baie... », « Progrès-Dimanche », 14 janvier 2007.

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Effectivement ! Quand Cromagnon et sa blonde n'ont pas le courage et l'intelligence de se faire violence, c'est l'extinction assurée. Et nous y sommes. Je me sens personnellement très à l'aise avec cette sorte d'aveu qui ne pourra certainement pas plaire à tout le monde. C'est ce qu'on appelle oser du bon bord ! Il est, en effet, illusoire d'imaginer un seul instant que les gens pourront se faire violence eux-mêmes. Ils prennent comme un dû inconditionnel tout ce qu'ils peuvent prélever et tant qu'ils le peuvent, sans se soucier des autres et de la suite. Une autre ressource... inépuisable (sic !) arrivée à son extrême limite. Comme le bois, l'eau, l'air, la faune terrestre et la tourte. Te voilà donc rendu, mon cher Roger, dans le camp des méchants « écolo-gauchistes » qui alimentent la Muse de votre chroniqueur vedette, l'ex-ministre des Catastrophes naturelles sous Bouchard, l'inénarrable Jacques Brassard. Bienvenue chez nous !

Pendant les années où je pratiquais le métier —extraordinaire et riches de rencontres— d'armurier de Chicoutimi, et lorsque j'ai entrepris l'écriture de l'histoire de la pêche blanche au Saguenay, début 2000, j'ai pu vérifier avec quelle triste insouciance les gens ont prélevé sans compter dans ce fabuleux patrimoine accumulé dans le retrait du glacier et par les âges. Parmi les nombreux témoignages accumulés lors de mon enquête sur le terrain, il est ressorti souvent qu'à l'époque où le sébaste abondait dans la Baie des Ha ! Ha ! (décennie 1980), bon nombre de « sportifs » (sic !) se faisaient comme un malin plaisir de les empiler derrière leurs cabanes, là où la bière et le petit bonheur aidant les amenaient à uriner comme des pochards.

En ce qui me concerne, arrêter cette prédation une année ou deux pour permettre à la faune halieutique de se reposer et pour rendre grâce à la Nature fatiguée, est un bien court délai eu égard aux méfaits causés dans la colonne des retombées économiques. Partis comme nous le sommes, au rythme où vont les choses dans cette histoire désolante, c'est le drame de la morue de l'Atlantique qui se prépare. Et lorsque ce temps, qui ne me semble pas très loin, sera arrivé, ils pourront alors tous brûler leurs cabanes mobiles et fermer commerces, car la source se sera tarie, et ce ne sera plus demain la veille...

Il faut prendre le temps d'applaudir et saluer le héraut quand il sait se faire porteur de vérité et de courage. Féliciations et vibrant merci à ce journaliste à qui il faudrait de suite donner un prix de mérite !

Russel Bouchard

vendredi, janvier 12, 2007

À qui l'Amazonie ? À qui la rivière Rupert ? À qui l'Arctique ? La Planète en péril ! Sortons de notre ignorance, ÇA PRESSE !...

Avec la courtoisie de Gaston Laurion, Canadien français, Montréal,
et Marie-Mance Vallée, Métisse du Saguenay et Canadienne française



« Superbe réponse du ministre brésilien de l'Education interrogé par des étudiants aux Etats-Unis... La presse nord-américaine a refusé de publier ce texte.

Pendant un débat dans une université aux États-unis, le ministre del'Éducation Cristovam Buarque, fut interrogé sur ce qu'il pensait au sujet de l'internationalisation de l'Amazonie.

Le jeune étudiant américain commença sa question en affirmant qu'il espérait une réponse d'un humaniste et non d'un Brésilien.

Réponse de M. Cristovam Buarque: En effet, en tant que Brésilien je m'élèverais tout simplement contre l'internationalisation de l'Amazonie. Quelle que soit l'insuffisance de l'attention de nos gouvernements pour ce patrimoine, il est nôtre. En tant qu'humaniste, conscient du risque de dégradation du milieu ambiant dont souffre l'Amazonie, je peux imaginer que l'Amazonie soit internationalisée, comme du reste tout ce qui a de l'importance pour toute l'humanité. Si, au nom d'une éthique humaniste, nous devions internationaliser l'Amazonie, alors nous devrions internationaliser les réserves de pétrole du monde entier.

Le pétrole est aussi important pour le bien-être de l'humanité que l'Amazonie l'est pour notre avenir. Et malgré cela, les maîtres des réserves de pétrole se sentent le droit d'augmenter ou de diminuer l'extraction de pétrole, comme d'augmenter ou non son prix.

De la même manière, on devrait internationaliser le capital financier des pays riches. Si l'Amazonie est une réserve pour tous les hommes, elle ne peut être brûlée par la volonté de son propriétaire, ou d'un pays Brûler l'Amazonie, c'est aussi grave que le chômage provoqué par les décisions arbitraires des spéculateurs de l'économie globale. Nous ne pouvons pas laisser les réserves financières brûler des pays entiers pour le bon plaisir de la spéculation.

Avant l'Amazonie, j'aimerai assister à l'internationalisation de tous les grands musées du monde. Le Louvre ne doit pas appartenir à la seule France. Chaque musée du monde est le gardien des plus belles oeuvres produites par le génie humain. On ne peut pas laisser ce patrimoine culturel, au même titre que le patrimoine naturel de l'Amazonie, être manipulé et détruit selon la fantaisie d'un seul propriétaire ou d'un seul pays. Il y a quelque temps, un millionnaire japonais a décidé d'enterrer avec lui le tableau d'un grand maître. Avant que cela n'arrive, il faudrait internationaliser ce tableau.

Pendant que cette rencontre se déroule, les Nations unies organisent le Forum du Millénaire, mais certains Présidents de pays ont eu des difficultés pour y assister, à cause de difficultés aux frontières des États-unis. Je crois donc qu'il faudrait que New York, lieu du siège des Nations unies, soit internationalisé. Au moins Manhattan devrait appartenir à toute l'humanité. Comme du reste Paris, Venise, Rome, Londres, Rio de Janeiro, Brasília, Recife, chaque ville avec sa beauté particulière, et son histoire du monde devraient appartenir au monde entier

Si les États-Unis veulent internationaliser l'Amazonie à cause du risque que fait courir le fait de la laisser entre les mains des Brésiliens, alors internationalisons aussi tout l'arsenal nucléaire des États-unis. Ne serait-ce que par ce qu'ils sont capables d'utiliser de telles armes, ce qui provoquerait une destruction mille fois plus vaste que les déplorables incendies des forêts brésiliennes. Au cours de leurs débats, les actuels candidats à la Présidence des Etats-Unis ont soutenu l'idée d'une internationalisation des réserves forestières du monde en échange d'un effacement de la dette. Commençons donc par utiliser cette dette pour s'assurer que tous les enfants du monde aient la possibilité de manger et d'aller à l'école.

Internationalisons les enfants, en les traitant, où qu'ils naissent, comme un patrimoine qui mérite l'attention du monde entier. Davantage encore que l'Amazonie.Quand les dirigeants du monde traiteront les enfants pauvres du monde comme un Patrimoine de l'Humanité, ils ne les laisseront pas travailler alors qu'ils devraient aller à l'école, ils ne les laisseront pas mourir alors qu'ils devraient vivre.

En tant qu'humaniste, j'accepte de défendre l'idée d'une internationalisation du monde. Mais tant que le monde me traitera
comme un Brésilien, je lutterai pour que l'Amazonie soit à nous. Et seulement à nous !

Ce texte n'a pas été publié.
Aidez à sa diffusion.

Merci !!!»

mercredi, janvier 10, 2007

229 ans après sa mort, Voltaire, ce messager de la tolérance, survit fort bien au massacre du temps, mais reste toujours victime de la sottise humaine

« Les sottises qu'on fait, qu'on dit, et qu'on écrit, étant plus multipliées que la race de Jacob, et que les sables de la mer, il est difficile de faire un choix. Toutes ces innombrables vessies, accumulées les unes sur les autres dans le gouffre de l'oubli, crèvent au moment qu'elles sont formées, et il en résulte un immense nuage, dans lequel on ne discerne plus rien. Les journaux et les mercures tâchent en vain de faire vivre un mois ou quinze jours les sottises nouvelles ; mais entraînées eux-mêmes dans l'abyme, ils sy précipitent avec elles, comme les nageurs maladroits vont au fond de l'eau en voulant donner la main aux passagers qui se noient [dans] l'éternité du néant. »
Voltaire, « Réflexion pour les sots », 1760.

Hommage à Voltaire d'Akakia


VOLTAIRE et CANDIDE n’en ont pas fini avec la censure !

Après avoir vu la première du Candide de Léonard Bernstein qui a fait un triomphe public au Châtelet à Paris fin décembre, Stéphane Lissner surintendant de la Scala a décidé de le retirer de l’affiche du théâtre lyrique milanais estimant que cette adaptation du chef d’œuvre de Voltaire et de Bernstein « n’était pas conforme à la programmation artistique de la Scala » ;

La presse italienne a surtout retenu la « censure » infligée à une satire des puissants de ce monde… Ce qui est étonnant , c’est que les producteurs de spectacles de cette envergure puissent découvrir aussi tard qu’ils ne correspondent pas à l’esprit des maisons qui les financent...

Qu’en penserait Voltaire ?

Richard Heuzé , Le Figaro
des 30 et 31 décembre 2006
Courtoisie de Lucien Choudin,
VOLTAIRE À FERNEY
26, Grand' Rue
01210 Ferney-Voltaire

samedi, janvier 06, 2007

Nouvelle politique forestière du Québec – Où le jeu de qui perd gagne !

Lettre ouverte à l'éditorialiste du journal «Le Quotidien»,
en réaction à son commentaire de ce 6 janvier 2007,
titré : « Industrie forestière : innover pour survivre »


Chicoutimi, le 6 janvier 2007

Bonjour Carol.
J'ai évidemment lu avec beaucoup d'intérêt ton éditorial paru ce matin dans « Le Quotidien ». Ce mot n'a rien d'une critique, mais se veut plutôt l'expression d'un questionnement personnel que je te soumets à toi, à tes lecteurs et aux miens qui parcourent « Les délires d'Akakia ».

Tu écris donc ce matin : « Pour une fois, le Saguenay–Lac-Saint-Jean a été « épargné ». La capacité de coupe est passée de 20% à 18%, alors que les observateurs s'attendaient plutôt à ce qu'elle atteigne 35%. C'est la Côte-Nord qui écope. »

Voilà plutôt ce que je pense, après toute la réflexion et l'analyse des documents qui ont mené à la publication de mon livre, en 2004, « Annales de l'industrie forestière au Saguenay–Lac-Saint-Jean (1945-2000 ». Notre belle et grande région n'a pas été épargnée ; elle a été radicalement mise à contribution ! Et les seuls qui vont en bénéficier chez nous, sont les détenteurs de caffs et les petits investisseurs, sans alternatives, coincés avec la dette de leur machinerie forestière. Ces derniers (les petits investisseurs) ne sont pas coupables, ils sont victimes.

Avant l'annonce de cette politique, notre région produisait 25% de la matière ligneuse commerciale utilisée dans tout le Québec, pour 16% de la forêt publique commerciale. Si notre pouvoir de coupe a été, toutes proportions gardées, moins affecté que le reste du Québec et que nous continuons toujours à perdre usines et emplois dans cette industrie particulièrement démolie (irrémédiablement démolie !), c'est donc que nous produisons d'avantage de matière brute compte tenu de l'ensemble du potentiel québécois, pour obtenir moins de retombées et dans l'unique perspective de combler les besoins nationaux accouplés à ceux de quelques usines qui ne sont pas nécessairement établies chez nous. 

Ou va tout ce bois ? Où sont localisées géographiquement ces usines ? Certainement pas au Saguenay et au Lac-Saint-Jean, puisqu'elles ferment l'une après l'autre ?!

Cela étant, qu'arrivera-t-il à l'industrie forestière du Saguenay–Lac-Saint-Jean, dans dix ans, dans quinze ans, dans vingt ans, lorsque les structures fondamentales de cette économie auront été corrigées pour le bien commun national ? Que nous arrivera-t-il lorsque les autres régions du Québec, fortes de la croissance de leurs forêts laissées jusqu'alors en repos, se seront remises à produire alors que nos forêts, sacrifiées sur l'autel des grands intérêts qui nous échappent, auront été davantage sollicités ? Qui seront les gagnants, les grands ? Les perdants ?

Je n'ai pas de réponse. Que des craintes. Et plus je vois se déballer les annonces publiques qu'on nous présente comme des petites « victoires » régionales, plus je me questionne pour notre suite, pour notre propre prospérité, pour notre survie...

Russel Bouchard