dimanche, mai 05, 2019

Métis canadiens-français, Indiens sans statut et Indiens hors réserve : le dernier combat...

Chronique de Isabelle Haché, publié dans le journal La Presse de ce 5 mai 2019.


Dans une série d’articles consacrée aux Métis autochtones qui hantent les couloirs des prisons du Québec, la journaliste de La Presse montréalaise bien subventionnée par le gouvernement Trudeau, Isabelle Haché, fustige ces « Autochtones autoproclamés » qui, dit-elle, « n’ont qu’à se déclarer Métis dans des pénitenciers fédéraux pour bénéficier de privilèges réservés aux détenus autochtones ». Comme à son habitude, cette chroniqueuse autoproclamée spécialiste des autochtones qui n’y connaît strictement rien en histoire et en anthropologie, réussit à nous éblouir par la somme de préjugés qu’elle réussit à ramasser en un seul article et se permet de porter des jugements à l’emporte-pièce destinés à soumettre les esprits les moins bien préparés. Et curieusement, ces articles dévastateurs sont publiés en même temps que l’on vient d’apprendre que la Cour suprême du Canada a refusé d’entendre la cause des Métis du Saguenay-Lac-Jean qui se battent bec et ongles contre le gouvernement du Québec depuis 2005 pour empêcher le gouvernement de démolir leurs camps de chasse familial et les expulser de leur territoire de chasse ancestral.

Face à un tel délire de mauvaise foi, une première question mérite d’être posée. Pourquoi toute cette attention si subite et si négative, de la part des médias traditionnels et montréalisés, envers ce phénomène d’expression identitaire et spirituelle de plus en plus apparent ? Difficile pour moi de ne pas m’interroger sur les intérêts cachés derrière une telle concentration d’avis dévastateurs allant à l’encontre des Métis du Québec, alors que l’ensemble de la société québécoise (Montréal contre les régions, derniers arrivants contre de souches, fondamentalistes musulmans contre judéo-chrétiens) s’affronte âprement sur le champ de bataille de l’identité nationale, de la religion et de la laïcité.

Dans ce contexte, n’est-il pas étrange de voir que tous les tribunaux du pays, Cour suprême en tête, expriment, d’une part, leur pleine volonté de protéger les cultures et les religions quelles qu’elles soient, et qu’ils se refusent, d’autre part, de reconnaître et de protéger celles des Métis qui en auraient bien besoin par les temps qui courent ?

« Ils se disent aînés et décrochent de lucratifs contrats dans des pénitenciers pour aider les détenus autochtones à renouer avec leur spiritualité et leurs traditions culturelles », écrit le chef de pupitre de La Presse en présentant un second article en deux jours, d’Isabelle Haché, publié sous le titre particulièrement biaisé de « Des aînés autochtones sortis de nulle part ». Évidemment, quand on est mal instruit de la question autochtone et qu’on a un parti pris bourré de préjugés dès le départ, on peut voir les choses sous cet angle superficiel. Quand on ne sait pas de quoi on parle et qu’on veut malgré tout trancher sur la question, on ne s’indispose pas des accrocs faits à la réalité et on ne soucie pas du tort qu’on crée à l’émancipation des esprits.

Tout ça, ces gestuels et ces rituels autochtones exprimés ainsi dans ce qui nous apparaît comme une affirmation identitaire récente, semblent désarticulés, mais ce ne l’est pas. D’instinct, ces pauvres gens (tous Canadiens français de sang mêlés, Indiens hors réserve et sans statut, Métis) se sont repliés vers leurs ultimes racines indiennes, si ténues soient-elles pour un bon nombre d’entre eux, afin de survivre dans ce pays où ils n’ont plus leur place. Ils le font dans l’espoir de récupérer la place qu’ils tiennent dans l’histoire de ce pays et pour se reconstruire une identité en tentant de se recoller une courtepointe culturelle qui fait appel à leurs racines, à leurs mémoires instinctives, à l’idée qu’ils ont d’eux, et en se redessinant des mythes fondateurs.

C’est très très puissant ce qui se passe. Ils font ce que les Indiens du Québec font depuis le rapatriement constitutionnel de 1982. Et on (les journalistes et les observateurs ordinaires) ne le voit pas parce qu’ils s’arrêtent à la forme et restent prisonniers de cette perception que le système a forgé depuis notre plus jeune âge. Ils préfèrent compter les gouttes de sang et donner une date de péremption à nos racines ancestrales.

Ces prisonniers, qui font partie de notre propre peuple et qui sont aussi Nous, y trouvent un ultime refuge pour éviter d’être rien ! Et la cause de cet ultime repli se trouve dans la collusion entre les Parlements qui ne représentent plus que des intérêts, les institutions en tous genres magistralement corrompues et compromises envers les subventions et les cours de justice, et plus intensément de la Cour suprême à laquelle la Constitution a confié à des non élus le pouvoir de confirmer les privilèges des possédants et de statuer sur l'identité des personnes ce qui est une aberration en soi !

En fait, c’est un programme de déconstruction de la société québécoise qu’ils tentent de remplacer par des immigrants. Ils ont eu les Acadiens, ils ont eu les Canadiens-Francais, ils sont en passe d’avoir les Métis et ils sont en train d’avoir les Indiens qui n’ont pas compris qu’ils étaient les derniers de la liste des peuples fondateurs inscrits dans la projet d’extermination. Dans cinquante ans, ce sera chose faite.

Ruyssel-Aurore Bouchard