jeudi, avril 21, 2016

Registre des armes à feu au Québec, attention ! État policier droit devant...


La courbe du haut montre l’évolution du taux de suicides au Québec, de 1960 à 2000. Les autres courbes montrent l’évolution du taux de suicides dans des sociétés judéo-chrétiennes et culturellement comparables. En fait, tout s’explique par les choix de société que nous avons fait et continuons de faire par la voie de nos Parlements successifs qui, depuis le début de la Révolution dite tranquille au Québec, ont totalement failli à la tâche dans leurs devoirs d’établir les bases d’une société juste, équitable et moralement saine ! Le suicide est d’abord et avant tout un fait social, et les armes à feu n’ont absolument rien à voir avec les taux. Selon le rapport publié en 2008 par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), au Japon, où les armes à feu, toutes catégories (y compris les répliques en plastique) sont sous la loi d’un interdit total, le taux de suicides est de 24,4 par 100,000 habitants ; ce qui le place au 5e rang mondial, loin devant les États-Unis (39e rang, avec 11,1), Israël (67e rang, avec 6,2) et l’Afrique du Sud (94e rang, avec 0,9) qui sont des pays où les populations civiles sont considérées comme les plus armées au monde. Le Canada est au 36e rang et figure admirablement bien dans la moyenne mondiale, avec un taux de 11,6 par 100,000 habitants.
Source du graphique : Charles Côté, Sociologue, 2014

Dans une ultime sortie médiatique publiée dans le Journal de Montréal en date du 21 avril 2016, les représentants des associations policières du Québec unissent à nouveau leurs voix pour mettre de la pression sur le gouvernement Couillard afin qu’il passe à l’acte et impose sa loi, envers et contre tous. Pour Denis Côté et Pierre Veilleux, respectivement Président de la Fédération des Policiers et Policières du Québec (FPMQ) et Président de l’Association des policiers provinciaux du Québec (APPQ). Motifs évoqués, toujours les mêmes, la police aura un outil essentiel pour assurer sa sécurité et celle du public.

Je ne sais pas comment vous vous sentez face à ce déréglement éthique de la part des représentants des différents corps policiers du Québec depuis l’annonce du projet de loi, en décembre dernier. J’ignore comment vous recevez ce genre d’appels à l’ordre policier auprès des élus parlementaires, mais moi je vous avoue que ça m’inquiète au point de me réveiller la nuit ! De fait, comment pourrions-nous accepter, en tant que société démocratique, que les représentants des corps policiers du Québec, au nom de leurs membres et de leurs intérêts corporatifs particuliers, puissent sortir ainsi de leur devoir de réserve avec une telle facilité pour s’ingérer dans les rouages parlementaires ?! Si nous étions dans la Russie soviétique, en Chine ou en Corée du Nord, je comprendrais que les choses se passent ainsi et que la police puisse imposer sa voix de la sorte. Mais je vous rappelle que nous sommes au Québec, dans un État démocratique parlementaire qui vit encore au rythme de la séparation des pouvoirs, et que la police, qui est le bras armé de la Justice, est là non pas pour écrire les lois mais pour les faire respecter !!!

J’aurais voulu faire valoir ce point d’ordre et m’opposer notamment à cette dérive totalitaire lors de la Commission parlementaire instituée pour répondre aux nombreuses questions soulevées par la population qui ne le voit vraiment pas d’un même oeil. J’aurais bien voulu avoir la voix au chapitre comme ces représentants de la Fraternité des policiers du Québec qui ont eu toute la place voulu au Salon rouge. Mais je n’ai pas eu cette opportunité à laquelle j’avais pourtant droit en tant que citoyenne, historienne, scientifique. Pour les intéressés, sachez cependant que mon mémoire, titré « Immatriculation des armes à feu, un projet de loi qui foule au pied la réalité du Québec profond, qui vise la mauvaise cible et qui mine les bases de la démocratie », est disponible gratuitement sur le site de réputation mondiale, « Les Classiques des Sciences sociales ».

Russel-Aurore Bouchard
Historienne
Chicoutimi