Racines autochtones, la chasse aux sorcières
Depuis une semaine, pas une journée qui se passe dans l’Est sans qu’un professeur universitaire associé fasse les colonnes des médias pour avoir enfin réussi à « démystifier » la fameuse question des Métis du Québec et dans les Maritimes. Avant-hier, c’était un prof de l’université de Halifax, hier le prof Delage et au aujourd’hui le très respecté Mario Dumont, chroniqueur au Journal de Montréal, qui ramasse les feuillets des chercheurs autoproclamés spécialistes des racines autochtones en tous genres pour en faire son papier du jour. Il semble que la question a été soulevée du fait qu’une conseillère de la ville de Montréal, Marie-Josée Parent, aurait menti sur ses racines autochtones. Son cas ne m’intéresse pas, car ce serait dévier de la question.
On en est donc rendu là comme société ! On se croirait en plein remake du début des années 1940, en Allemagne à l’aube de cette sordide époque où chacun essayait de se trouver des racines ariennes pour pouvoir accéder à une fonction publique, garder son échoppe voire même garder sa vie ! Permettez que je m’insurge à deux mains contre ce qui est en train de devenir une inquiétante dérive sociétale. Seule différence, aujourd’hui, c’est par la négation de ce que vous êtes qu’on tente de vous réduire à rien, de vous replacer dans ce rien du Canada post-national et multiculturel de Justin Trudeau. Si ça ne vous porte pas à réfléchir, moi si.
Voici le topo. Depuis 1982, en fait depuis le rapatriement constitutionnel, il a été institué à l’article 35 de la constitution qu’un Autochtone est un Indien, un Inuit et un Métis. Cette définition d’un autochtone, n’est pas nouvelle et se rapporte du reste à celle de 1850 qui disait exactement la même chose avec d’autres mots. Qui est Indien ? Qui est Métis ? La cour suprême du Canada, dans son jugement Powley, en a apporté une définition qui ne tient pas compte de la réalité du Québec et des Maritimes car elle tient compte seulement du fait qu’une communauté autochtone au Canada ne peut être autrement qu’un groupe qui vit dans une réserve. Or, les Métis, parce qu’ils ne sont pas nés dans des réserves, ont une embûche de taille puisqu’ils ont constitué simplement des clans familiaux, indépendants, non coercitifs et non concurrentiels comme c’est le cas des communautés indiennes.
D'autre part, la Cour suprême n’a pas apporté de précision sur le nombre de liens généalogiques d’un individu ni donné de date de péremption pour qu’un Métis ne soit plus un Métis. Elle a simplement dit qu’il fallait avoir une ou des racines autochtones, que la date buttoir était les premiers contacts entre Indiens et Blancs, qu’il fallait s’auto-identifier Métis et qu´il fallait avoir été culturellement éduqué dans un milieu métis. Ce qui est le cas notamment de Métabetchouan, Chicoutimi, Tadoussac, Sept-Iles, etc.
Cela dit, ceux qui s’opposent au fait Métis au Québec et dans les Maritimes, notamment les Indiens qui veulent conserver l’exclusivité du titre autochtone pour tous les privilèges qu’il rapporte, ceux là dis-je bien se sont associés de longue date à des profs universitaires pour construire un discours qui nie le fait Métis chez nous. Et ils y mettent de l’argent, croyez-moi ! Et on les voit apparaître dans les médias en tentant de réduire tout le monde au silence et en y mettant tout le poids du prestige de leurs titres universitaires.
Certains en sont même rendus à menacer de publier, dans les journaux, les arbres généalogiques de ce qu’ils qualifient malveillamment de... « faux Métis », et je dis alors attention ! Car si vous voulez jouer à ce jeu, je vais vous publier sur le web des dizaines de généalogies d’Indiens statués qui vivent en réserve et dont la généalogie ne peut trouver un seul ancêtre Indien avant la huitième génération. Et vous seriez surpris de voir des noms. J’espère simplement qu’on n’en soit pas rendu là !
Petit conseil, ne réduisez pas ainsi la question identitaire. C’est aussi puissant et incontournable que sacré. Je suis Métisse, mes origines sont Indiennes, Françaises et Écossaises, c’est mon histoire, ma famille et j’en suis fière. Pas question de vous laisser me dépouiller de mon identité et de mon histoire...
Akakia
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