samedi, novembre 09, 2019

Mashteuiatsh, réserve Indienne ? réserve Métisse ?? ou pas réserve du tout ???


Déclaration de Rémi Kurtness, alors chef de la réserve de Pointe Bleue, dans le journal Le Quotidien, du 13 mars 1996.

Depuis plus d'une semaine, il n'y a pas une journée où on ne voit pas apparaître dans les médias traditionnels des sorties de professeurs patentés à la mode universitaire et payés pour parler en choeur, sur la question autochtone au Québec. Selon eux, tout le monde est métissé au Québec, y compris les Chinois qui viennent de débarquer en ne parlant que le mandarin, et les familles arrivant de Ouagadougou et de Syrie par la passoire du chemin Roxham le mois dernier. Comme ça, il n'y a donc plus de Métis au Québec ni dans les maritimes puisque nous sommes tous métissés. Ils ont fait disparaître les Canadiens français du Québec le soir de la défaite référendaire de 1995, et les voilà qu'ils s'acharnent maintenant sur les Métis. Comme ça, nous serons tous des arrivants ! Et Trudeau aura finalement réussi à fermer jusqu'au jugement dernier le couvercle du tombeau sur notre cadavre existentiel.

Il faudra bien qu'on se décide un jour. Y a-t-il des Métis, c'est-à-dire des personnes qui, selon l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 : 1- comptent un ou plusieurs ancêtres « Indiens » et « Blancs » ; 2- qui ont évolué dans une communauté culturelle et historique métisse ; 3- et qui s'auto-identifient Métis. S'il faut en croire le prof Denys Delage ou cet autre de l'Université de Halifax dont j'ai oublié déjà le nom, nous sommes tous métissés mais il n'y a pas de Métis. Alors si c'est cela notre réalité historique, il faut donc lire la suite.

Retour sur les événements...

Au printemps 1995, juste avant que je lance mon livre « Le Dernier des Montagnais », la réserve Indienne de Pointe-Bleue (Mashteuiatsh aujourd'hui) et les autres du Saguenay–Lac-Saint-Jean—Côte-Nord étaient toutes des réserves Montagnaises. Mon livre a alors fait scandale et pas des plus petits ! Les chef Indiens se sont insurgés et m'ont traité de raciste, et tous les profs d'université qui avaient contribué à construire l'identité indienne –factice— les ont appuyés pour ne pas perdre la face et leurs subventions. Car mon livre, en fait, était criminellement responsable de contredire le discours amérindianophile exclusif au Québec et osait obliger tout ce beau monde à refaire leurs devoirs.

Ainsi donc, mon livre reposait toute la question de l'histoire de l'autochtonie telle qu'elle est enseignée depuis les années 1970 chez nous. Les professeurs (y compris Denis Delage qui avait alors refusé de me rencontrer dans un débat contradictoire à Québec) ont clamé en coeur qu'il n'y avait pas de Métis et ont même poussé le bouchon jusqu'à interdire à leurs étudiants de citer mes livres dans leurs travaux et leurs thèses sous peine d'échouer (j'ai des preuves écrites de tout ce que j'avance ici !). Et puis, un beau jour de cette même année 1996, quand la chicane a dégénéré à Radio-Canada et ailleurs au pays, les Montagnais ont disparu du radar pour dire qu'ils étaient des Ilnutsh (voyez pourtant comment se présente alors Rémi Kurtness au bas de sa photo placardée dans le journal ci-joint). C'était, en fait, la parade pour pouvoir passer une éventuelle épreuve devant la Cour suprême, car ils avaient compris, après la sortie de mon livre, sans l'avouer et comme je l'avais écrit, que les Montagnais des contacts avaient bel et bien disparu dans le dernier quart du XVIIe siècle.

Appelé à commenter mon livre dans les heures chaudes de cette controverse historique, Rémi Kurtness, qui était alors le chef de la réserve de Pointe-Bleue devenue Mashteuiatsh, fit une première sortie dans les journaux pour remettre les pendules à l'heure et déclarer solennellement que oui, « il y a des Métis » au Québec et qu'il ne faudrait surtout pas en profiter pour nier leurs droits ancestraux. Et pour que vous puissiez en juger par vous-mêmes, voici ce qu'il déclarait alors, textuellement, au journal Le Quotidien du 13 mars 1996.

Citation :

« SI LE MÉTISSAGE DEVENAIT UN CRITÈRE POUR JUGER DE L'EXISTENCE D'UN PEUPLE, ON NE CONNAÎTRAIT PAS BEAUCOUP DE PEUPLE DANS LE MONDE. LE MÉTISSAGE, AU CONTRAIRE, EST UNE PREUVE D'ÉVOLUTION D'UN PEUPLE » (cf., Rémy Kurtness, photo de la page du journal ci-jointe). C'est textuel et ce sont les mots de celui qui était alors chef de Pointe-Bleue et négociateur en chef du projet de traité dit l'Approche commune. Et je vous fais grâce des commentaires du journaliste Louis Tremblay qui accompagnent cette déclaration en tapant des mains comme une otarie à qui on vient de donner un poisson. Et des déclarations de la sorte, j'en ai plein mes dossiers...

Si M. Kurtness a pris le risque d'énoncer publiquement cette vérité, c'est donc qu'il voyait poindre à l'horizon un énorme danger pour ceux et celles de son peuple dans la lutte qu'il menait dans la quête de leurs droits ancestraux qui, soit dit en passant, sont des droits collectifs et non individuels. M. Kurtness, un homme brillant pour lequel j'ai de l'estime, savait fort bien que sa communauté n'était alors peuplée que de Métis et que, parmi eux, plusieurs s'auto-identifiaient depuis toujours comme Métis. C'était notamment le cas de Bernard Cleary, un voisin de mon quartier et un de mes pourfendeurs dans cette histoire, lequel se reconnait dans ses propres origines amérindiennes venues de la Mauricie.

Cela étant, s'il n'y a pas de Métis et que du métissage au Québec, comme le soutiennent tous ces chercheurs auto-proclamés spécialistes en amérindianité et tous ces chefs Indiens, alors fermons les réserves de Mashteuiatsh, Pessamit, Sept-Iles, etc..., car le problème est maintenant réglé : Il n'y plus d'Indiens au Québec. Que des migrants métissés...