Accommodement raisonnable — Voilà ce qui arrive quand les clercs et les chefs trahissent leur mission et le peuple !
Il est beaucoup question ces jours-ci des dérives de « l'accommodement raisonnable ». Hier, à la télé francophone, M. Bernard Landry, s'insurgeait avec effusion contre cette inacceptable dérive et fustigeait tous les chefs d'aujourd'hui pour tant de laxisme.
Curieux comment les gens ont la mémoire courte ! Je pourrais vous sortir profusions de textes et déclarations solennelles de cet ex-premier ministre qui, lorsqu'il a investi la première chaise au Parlement du Québec, parlait allègrement en faisant toutes les liaisons possibles et impossibles, en vantant les mérites, d'une nation « civique », « inclusive », « communautaire » et des plus généreuses pour l'arrivant qu'il n'avait de cesse de flatter dans le bon sens du poil.
C'était le temps des prophètes de « la nation québécoise au futur et des sans racines », une nation franco-québécoise, inodore, incolore, indolore et mortellement soumise au diktat du dernier réfugié qu'il ne fallait pas heurter. Rappelez-vous. Se dire Canadiens français, l'un des peuples fondateurs du Québec, était alors considéré comme une déclaration raciste, dégradante et rétrograde. C'était le temps du beau risque de l'avant, du pendant et de l'après Lucien Bouchard. Le temps où tous les délires sémantiques étaient permis pourvu que nous cachions sous notre bonnasserie les fibres profondes du vrai pays, et « brûlions au feu de la St-Jean nos racines françaises» et nos ceintures fléchées pour ne pas heurter tous les Luke Mervil du Québec.
Vous avez déjà oublié ? Moi pas ! Voyez le texte qui suit. Il date du 21 janvier 2001. Aucun journal, cette semaine-là, n'avait voulu le publier. J'ai dû le faire moi-même, à quelques dizaines d'exemplaires. Permettez que je vous rappelle...
Akakia
«Une race trahie par ses chefs» !...
par
Russel Bouchard
—Dans la foulée de ce qu’il convient désormais d’appeler
L’Affaire-Michaud—
« Le fondement d’un État c’est le peuple ; si ce fondement
n’est que de terre et de boue, l’État ne peut durer longtemps.»
Louis XVI, Oeuvres
De la somme des écrits qui s’empilent déjà dans notre jardin des oubliettes comme feuilles d’automne précoce, je retiendrai du fracas médiatique qui a suivi la démission de Lucien Bouchard, celui d’un certain Michel Seymour (?), un illustre inconnu du département de philosophie de l’Université de Montréal qui, d’un grand coup de langue donné le 16 janvier dans la page des «Idées» du Devoir, parle d’un... «héritage impressionnant» (sic) en évoquant avec beaucoup d’émotion des retombées de son règne subitement abrégé. Le bienheureux quidam n’y va pas par quatre chemins quand il s’exprime sur l’épineuse question nationale. Mais qui osera le lui reprocher, à lui, qu’il crache dans la soupe, et qui osera me tenir rigueur, à moi, de crier qu’il y en a marre de se tasser dans le coin de la bécosse pour que la visite qui entend rester se sente à l’aise dans le salon bleu de la maison ?! Parmi les défis à surmonter avant d’atteindre «l’idéal social-démocrate», plaide ainsi notre concitoyen philosophe, «il faudra également poursuivre l’implantation d’un nationalisme civique au Québec et s’affranchir une fois pour toutes du nationalisme exclusivement axé sur la majorité canadienne-française». Racistes, vous dites ?!
Nous y voilà donc ! Comme en 1791 !! Comme en 1840 !!! Une conscience —canadienne-française de préférence— à exorciser de cette Terre de nos aïeux.
On aura évidemment compris par cet autre coup de pied de l’âne qu’on peut être tout dans ce «pays» en devenir, qu’on peut se réclamer d’une impénétrable et insondable fratrie migratrice, qu’on peut être de l’archiconfrérie des évadés de l’île du Croissant Vermeil venue planter leur pagode à deux pas de l’Assemblée nationale, mais jamais, jamais au grand jamais peut-on se réclamer de la nation canadienne-française, l’hôtesse bienveillante et moribonde par qui passe le scandale. Par un curieux retour de l’histoire, et au fil d’un combat sensé libérer tout un peuple, les termes identitaires («race», «ethnie», «Canadien-français») sont devenus tabous. Même que simplement les évoquer ou référer à la mémoire de Groulx pour tenter d’exprimer sa pensée, est devenu suspect aux yeux de ceux et celles des nôtres qui ont reçu mission de nous amener, envers et contre tous, à la Terre Promise dont les contours brumeux ont été redessinés à partir de la nouvelle réalité démographique pluri-ethnique de Montréal ! Franco-québécois, qu’il disait l’idéologue réductionniste, le frère de l’autre, pour un peuple bonasse extirpé de son histoire et qui a accepté de se laisser déshabiller de sa mémoire sans s’y objecter !
Me voilà ainsi —et bien contre moi— devenu membre d’une communauté culturelle quelconque perdue au coeur d’une quelconque nation franco-québécoise, elle-même perdue à l’extérieur du trou de beigne d’une grande île avec laquelle on (ce qui m’exclut) entend bien me faire pays sans tenir compte de l’image que je m’en fais et des rêves que je nourris ! Comme acte de reddition et geste d’assimilation, impossible de faire mieux ! Une mouche dans le lait, me voilà donc devenue. Suicide collectif autoprogrammé (voir absolument le graphique ci-joint) par nos chefs assistés de L’État qui nous a lâchement et doublement trahi sous l’oeil naïf de l’élite intellectuelle de cette «nation», la mienne, est-ce possible ! qui n’en finit plus de s’humilier et de pourrir sous leur mortifiante défection et leur insoutenable concert de gémissements. Je crois comprendre aujourd’hui la détresse profonde de Groulx lorsqu’il s’abandonna à ses déceptions et dénonça sans poil à la patte, dans sa conférence prononcée au Monument national de Montréal, le 29 novembre 1943, «ce spectacle déprimant des lâchages et des reniements», et cette «procession funèbres de ces chiens crevés qui s’en vont au fil de l’eau, symbole poignant d’une race trahie par ses chefs».
C’est Durham qui doit être content !...
«On ne peut guère concevoir de nationalité plus dépourvue de tout ce qui peut vivifier et élever un peuple que celle des descendants des Français dans le Bas-Canada, du fait qu’ils ont conservé leur langue et leurs coutumes particulières. C’est un peuple sans histoire et sans littérature.» Lord Durham, 1839.
Et si on demandait simplement à nos partenaires juifs (croyez bien que j’envie leur solidarité indéfectible) de la «nation civique» franco-québécoise en devenir qui se sont insurgés au son des trompettes de Jérichos contre la déclaration de Monsieur Michaud, s’ils font partie d’une nation «ethnique», «civique» ou «culturelle», que répondraient-ils, eux ? M’est-il permis d’anticiper, de croire et de dire, sans détour aucun et sans devoir pour autant passer sous les fourches caudines de l’Assemblée nationale et sous un orage de crachats lancés par un commando de zélotes enragés, que chacun d’eux s’empresserait de rétorquer à bon droit qu’ils sont un, solidaires et indivisibles sur l’essentiel (ce qui est respectable comme point de vue), qu’ils savent bien d’expérience, eux, que la nation menacée —car c’est bien de la nation canadienne-française menacée de disparition dont il est toujours question dans le projet nationaliste, n’est-ce pas ?— n’existe plus du moment où elle perd un seul de ces trois attributs (qui sont, en d’autres mots, le sentiment d’appartenance à un groupe enraciné dans le temps et dans l’espace, une fraternité dessinée autour d’une conscience collective, un rêve commun et un bagage culturel particulier). Le reste, la cohabitation multi-ethnique —et «inclusive», cela va de soi, nul besoin de le préciser— que nous imposent l’histoire et une démographie canadienne-française dramatiquement défavorable (et dont le vocable a été, soit dit en passant, totalement éludé, hier, dans le discours à la chefferie de M. Landry), fait partie prenante du contrat social qui devrait dessiner, en principe, les contours de l’État-nation avec les communautés d’apport —rien d’autres ! «Le génie d’un peuple», écrivait encore Groulx dans une causerie prononcée le 13 septembre 1936, «n’est pas quelque chose de figé, de statique ; c’est une réalité essentiellement dynamique, en puissance d’évolution et d’enrichissement indéfinis.»
Cela dit, alors pourquoi, par un curieux dérapage de l’histoire, les Canadiens-français, l’ethnie fondatrice qui représente encore la majorité des «citoyens» de ce «pays», doivent-ils cesser de se réclamer d’une fraternité particulière partageant le même drame historique, doivent-ils accepter qu’on dénature leur mémoire et leur rêve communs, doivent-ils se résoudre à n’être plus qu’une vulgaire et anachronique composante culturelle perdue dans une quelconque nation franco-québécoise qui ressemble à tout sauf à moi, l’oublié du grand partage fleurdelisé, lui-même perdu sur sa banquise, à 500 km au nord de la grande île ? Suis-je coupable d’hérésie et punissable sans sommation, si je soutiens que le respect qu’on exige de l’un, implique nécessairement le respect que ce dernier entend recevoir de l’autre ?
Mais au fait et vu que nous y sommes, que reste-t-il du rêve de survie de mon peuple, à partir de ce nouveau canon évangélique nihiliste lancé dans la mêlée de la dernière et historique déroute référendaire ? Oui ! que reste-t-il ? «Si je vous ai bien compris» comme disait l’autre, si j’ai bien assimilé l’objet du débat et des raisons qui ont motivé l’abdication du Prince, les quelque 280 000 Canadiens-français de mon «pays» à moi (le Saguenay—Lac-Saint-Jean) qui forment encore 98,5% de notre population à Nous, sont tenus d’accepter de disparaître purement et simplement dans un tout dénaturé, inodore, incolore et montréalisé (les Franco-québécois), ils ne peuvent plus évoquer les souffrances et les espérances qui jalonnent les grands chapitres de leur histoire, pour que puisse enfin se réaliser le projet politique récupéré et dessiné depuis peu, par un groupe d’initiés, autour du melting-pot montréalais —sans égard à la réalité ethnique, géographique, civique, naturelle et culturelle de la «périphérie» (sic) assassinée par les dirigeants de sa capitale et de sa métropole ?
Sous sa forme nouvelle, mondialisation de l’économie et uniformisation des cultures aidant, la société québécoise s’est ainsi métamorphosée en un corps pervers qui a oublié sa seule raison d’être, l’entraide. Elle est devenue source des inégalités qui la désolidarisent, moteur de la pauvreté qui l’avilit, ferment des malheurs qui la divisent et des souffrances qui l’affligent. Et l’occasion est décidément trop belle pour ne pas vous rappeler que la première loi sociale devant avoir préséance sur toute autre et en tout temps, est celle qui garantit à tous les membres —individuels et régionaux— de la société le droit et les moyens d’exister. Quelle honte ce régime, pour l’avoir ainsi oubliée ! Quelle déception ce peuple, pour s’en être écartée !...
Russel Bouchard
Curieux comment les gens ont la mémoire courte ! Je pourrais vous sortir profusions de textes et déclarations solennelles de cet ex-premier ministre qui, lorsqu'il a investi la première chaise au Parlement du Québec, parlait allègrement en faisant toutes les liaisons possibles et impossibles, en vantant les mérites, d'une nation « civique », « inclusive », « communautaire » et des plus généreuses pour l'arrivant qu'il n'avait de cesse de flatter dans le bon sens du poil.
C'était le temps des prophètes de « la nation québécoise au futur et des sans racines », une nation franco-québécoise, inodore, incolore, indolore et mortellement soumise au diktat du dernier réfugié qu'il ne fallait pas heurter. Rappelez-vous. Se dire Canadiens français, l'un des peuples fondateurs du Québec, était alors considéré comme une déclaration raciste, dégradante et rétrograde. C'était le temps du beau risque de l'avant, du pendant et de l'après Lucien Bouchard. Le temps où tous les délires sémantiques étaient permis pourvu que nous cachions sous notre bonnasserie les fibres profondes du vrai pays, et « brûlions au feu de la St-Jean nos racines françaises» et nos ceintures fléchées pour ne pas heurter tous les Luke Mervil du Québec.
Vous avez déjà oublié ? Moi pas ! Voyez le texte qui suit. Il date du 21 janvier 2001. Aucun journal, cette semaine-là, n'avait voulu le publier. J'ai dû le faire moi-même, à quelques dizaines d'exemplaires. Permettez que je vous rappelle...
Akakia
«Une race trahie par ses chefs» !...
par
Russel Bouchard
—Dans la foulée de ce qu’il convient désormais d’appeler
L’Affaire-Michaud—
« Le fondement d’un État c’est le peuple ; si ce fondement
n’est que de terre et de boue, l’État ne peut durer longtemps.»
Louis XVI, Oeuvres
De la somme des écrits qui s’empilent déjà dans notre jardin des oubliettes comme feuilles d’automne précoce, je retiendrai du fracas médiatique qui a suivi la démission de Lucien Bouchard, celui d’un certain Michel Seymour (?), un illustre inconnu du département de philosophie de l’Université de Montréal qui, d’un grand coup de langue donné le 16 janvier dans la page des «Idées» du Devoir, parle d’un... «héritage impressionnant» (sic) en évoquant avec beaucoup d’émotion des retombées de son règne subitement abrégé. Le bienheureux quidam n’y va pas par quatre chemins quand il s’exprime sur l’épineuse question nationale. Mais qui osera le lui reprocher, à lui, qu’il crache dans la soupe, et qui osera me tenir rigueur, à moi, de crier qu’il y en a marre de se tasser dans le coin de la bécosse pour que la visite qui entend rester se sente à l’aise dans le salon bleu de la maison ?! Parmi les défis à surmonter avant d’atteindre «l’idéal social-démocrate», plaide ainsi notre concitoyen philosophe, «il faudra également poursuivre l’implantation d’un nationalisme civique au Québec et s’affranchir une fois pour toutes du nationalisme exclusivement axé sur la majorité canadienne-française». Racistes, vous dites ?!
Nous y voilà donc ! Comme en 1791 !! Comme en 1840 !!! Une conscience —canadienne-française de préférence— à exorciser de cette Terre de nos aïeux.
On aura évidemment compris par cet autre coup de pied de l’âne qu’on peut être tout dans ce «pays» en devenir, qu’on peut se réclamer d’une impénétrable et insondable fratrie migratrice, qu’on peut être de l’archiconfrérie des évadés de l’île du Croissant Vermeil venue planter leur pagode à deux pas de l’Assemblée nationale, mais jamais, jamais au grand jamais peut-on se réclamer de la nation canadienne-française, l’hôtesse bienveillante et moribonde par qui passe le scandale. Par un curieux retour de l’histoire, et au fil d’un combat sensé libérer tout un peuple, les termes identitaires («race», «ethnie», «Canadien-français») sont devenus tabous. Même que simplement les évoquer ou référer à la mémoire de Groulx pour tenter d’exprimer sa pensée, est devenu suspect aux yeux de ceux et celles des nôtres qui ont reçu mission de nous amener, envers et contre tous, à la Terre Promise dont les contours brumeux ont été redessinés à partir de la nouvelle réalité démographique pluri-ethnique de Montréal ! Franco-québécois, qu’il disait l’idéologue réductionniste, le frère de l’autre, pour un peuple bonasse extirpé de son histoire et qui a accepté de se laisser déshabiller de sa mémoire sans s’y objecter !
Me voilà ainsi —et bien contre moi— devenu membre d’une communauté culturelle quelconque perdue au coeur d’une quelconque nation franco-québécoise, elle-même perdue à l’extérieur du trou de beigne d’une grande île avec laquelle on (ce qui m’exclut) entend bien me faire pays sans tenir compte de l’image que je m’en fais et des rêves que je nourris ! Comme acte de reddition et geste d’assimilation, impossible de faire mieux ! Une mouche dans le lait, me voilà donc devenue. Suicide collectif autoprogrammé (voir absolument le graphique ci-joint) par nos chefs assistés de L’État qui nous a lâchement et doublement trahi sous l’oeil naïf de l’élite intellectuelle de cette «nation», la mienne, est-ce possible ! qui n’en finit plus de s’humilier et de pourrir sous leur mortifiante défection et leur insoutenable concert de gémissements. Je crois comprendre aujourd’hui la détresse profonde de Groulx lorsqu’il s’abandonna à ses déceptions et dénonça sans poil à la patte, dans sa conférence prononcée au Monument national de Montréal, le 29 novembre 1943, «ce spectacle déprimant des lâchages et des reniements», et cette «procession funèbres de ces chiens crevés qui s’en vont au fil de l’eau, symbole poignant d’une race trahie par ses chefs».
C’est Durham qui doit être content !...
«On ne peut guère concevoir de nationalité plus dépourvue de tout ce qui peut vivifier et élever un peuple que celle des descendants des Français dans le Bas-Canada, du fait qu’ils ont conservé leur langue et leurs coutumes particulières. C’est un peuple sans histoire et sans littérature.» Lord Durham, 1839.
Et si on demandait simplement à nos partenaires juifs (croyez bien que j’envie leur solidarité indéfectible) de la «nation civique» franco-québécoise en devenir qui se sont insurgés au son des trompettes de Jérichos contre la déclaration de Monsieur Michaud, s’ils font partie d’une nation «ethnique», «civique» ou «culturelle», que répondraient-ils, eux ? M’est-il permis d’anticiper, de croire et de dire, sans détour aucun et sans devoir pour autant passer sous les fourches caudines de l’Assemblée nationale et sous un orage de crachats lancés par un commando de zélotes enragés, que chacun d’eux s’empresserait de rétorquer à bon droit qu’ils sont un, solidaires et indivisibles sur l’essentiel (ce qui est respectable comme point de vue), qu’ils savent bien d’expérience, eux, que la nation menacée —car c’est bien de la nation canadienne-française menacée de disparition dont il est toujours question dans le projet nationaliste, n’est-ce pas ?— n’existe plus du moment où elle perd un seul de ces trois attributs (qui sont, en d’autres mots, le sentiment d’appartenance à un groupe enraciné dans le temps et dans l’espace, une fraternité dessinée autour d’une conscience collective, un rêve commun et un bagage culturel particulier). Le reste, la cohabitation multi-ethnique —et «inclusive», cela va de soi, nul besoin de le préciser— que nous imposent l’histoire et une démographie canadienne-française dramatiquement défavorable (et dont le vocable a été, soit dit en passant, totalement éludé, hier, dans le discours à la chefferie de M. Landry), fait partie prenante du contrat social qui devrait dessiner, en principe, les contours de l’État-nation avec les communautés d’apport —rien d’autres ! «Le génie d’un peuple», écrivait encore Groulx dans une causerie prononcée le 13 septembre 1936, «n’est pas quelque chose de figé, de statique ; c’est une réalité essentiellement dynamique, en puissance d’évolution et d’enrichissement indéfinis.»
Cela dit, alors pourquoi, par un curieux dérapage de l’histoire, les Canadiens-français, l’ethnie fondatrice qui représente encore la majorité des «citoyens» de ce «pays», doivent-ils cesser de se réclamer d’une fraternité particulière partageant le même drame historique, doivent-ils accepter qu’on dénature leur mémoire et leur rêve communs, doivent-ils se résoudre à n’être plus qu’une vulgaire et anachronique composante culturelle perdue dans une quelconque nation franco-québécoise qui ressemble à tout sauf à moi, l’oublié du grand partage fleurdelisé, lui-même perdu sur sa banquise, à 500 km au nord de la grande île ? Suis-je coupable d’hérésie et punissable sans sommation, si je soutiens que le respect qu’on exige de l’un, implique nécessairement le respect que ce dernier entend recevoir de l’autre ?
Mais au fait et vu que nous y sommes, que reste-t-il du rêve de survie de mon peuple, à partir de ce nouveau canon évangélique nihiliste lancé dans la mêlée de la dernière et historique déroute référendaire ? Oui ! que reste-t-il ? «Si je vous ai bien compris» comme disait l’autre, si j’ai bien assimilé l’objet du débat et des raisons qui ont motivé l’abdication du Prince, les quelque 280 000 Canadiens-français de mon «pays» à moi (le Saguenay—Lac-Saint-Jean) qui forment encore 98,5% de notre population à Nous, sont tenus d’accepter de disparaître purement et simplement dans un tout dénaturé, inodore, incolore et montréalisé (les Franco-québécois), ils ne peuvent plus évoquer les souffrances et les espérances qui jalonnent les grands chapitres de leur histoire, pour que puisse enfin se réaliser le projet politique récupéré et dessiné depuis peu, par un groupe d’initiés, autour du melting-pot montréalais —sans égard à la réalité ethnique, géographique, civique, naturelle et culturelle de la «périphérie» (sic) assassinée par les dirigeants de sa capitale et de sa métropole ?
Sous sa forme nouvelle, mondialisation de l’économie et uniformisation des cultures aidant, la société québécoise s’est ainsi métamorphosée en un corps pervers qui a oublié sa seule raison d’être, l’entraide. Elle est devenue source des inégalités qui la désolidarisent, moteur de la pauvreté qui l’avilit, ferment des malheurs qui la divisent et des souffrances qui l’affligent. Et l’occasion est décidément trop belle pour ne pas vous rappeler que la première loi sociale devant avoir préséance sur toute autre et en tout temps, est celle qui garantit à tous les membres —individuels et régionaux— de la société le droit et les moyens d’exister. Quelle honte ce régime, pour l’avoir ainsi oubliée ! Quelle déception ce peuple, pour s’en être écartée !...
Russel Bouchard
5 Comments:
dit :
J'assiste à tous ces débats avec tristesse et colère, dont certains propos sont souvent très méprisants pour les Canadiens français ou Québécois de souche française dont les chefs et les clercs ont fait depuis longtemps la démonstration qu'ils avaient une mentalité de « chiens battus », mais je me félicite d'être Métisse.
Ces débats ne me concernent plus. Je suis reconnue par l'article 35 de la constitution canadienne et j'ai un territoire, la Boréalie.
J'étais contre le communautarisme, mais nécessité fait loi. C'est une question de survie.
Métis, soyons optimistes et croyons en nous! N'attendons plus rien de ces troufions.
Marie Mance Vallée
dit :
Vous avez vu et entendu hier, lorsque M. Boisclair a précisé qu'il allait sortir le crucifix du Parlement !!! C'est donc là, pour le péquiou, la seule religion —celle de nos pères et mères qui ont bâti ce pays— qu'il va ligaturer.
Il va nous rester quoi, comme lieu commun, lorsque le Québec sera indépendant (disons plutôt le PQ, car ces-lui seul qui sera indépendant, pas le peuple !) ?
Bel accommodement !
dit :
Je me demande bien ce que nous, Métis et Canadiens français, serions devenus si les référendums avaient été gagnés????? Je n'ose même pas l'imaginer... Ils nous ont utilisé pendant des années, sans pour autant nous considérer. Ils nous ont traités du bout du pied. Nous étions leur faire-valoir.
Tournons la page et regardons plutôt la lueur au NORD.
Marie Mance Vallée
dit :
En effet, c'est ce qu'il faut faire pour survivre ! Tout est au Nord, c'est le pays.
dit :
Boisclair aura finalement trouvé le saint-Graal que tout le monde cherchait tant? Cette souche dont le Frère Delautre, descendant du Mont-Royal où il eut la révélation de la Nation Civique, demanda dans un grand cri au peuple en bas de jetter dans le feu de la Saint-Jean!
Était-ce donc çà la souche?
Il faudrait peut-être en glisser un mot au Frère Delautre car, voyez-vous, il s'apprête actuellement pour un grand chemin de croix pan-québécois afin de la trouver cette souche.
C'est que, voyez-vous, l'orsqu'il donna cet ordre aux Québécois, en redescendant de la montagne sacrée, ceux-ci, d'un pas bien assuré, s'en allèrent la quérir pour la jetter au feu mais ne la trouvèrent point. Ils l'ont cherché dans les écoles, dans les livres, dans les maisons, dans les parcs, dans les entreprises, même dans les coeurs, mais ne la trouvèrent pas cette damnée souche.
Ils retournèrent donc voir le Frère Delautre (dont le frère tout lucide est aux cieux) pour lui demander où elle se trouvait cette souche ou au moins de leur dire de quoi elle avait l'air. Mais le Frère Delautre leur répondit qu'il croyait de son côté que le peuple savait ce qu'elle était mais qu'à l'évidence plus personne ne savait à quoi elle ressemblait ou du lieu où elle se trouvait.
Le Frère Delautre retourna alors prier sur le Mont-Royal au pied de la croix du Dieu Civa et implora celui-ci de lui expliquer le sens de l'ordre étrange qu'il lui avait révélé.
Le Dieu Civa, dans son infinie civilité, lui envoya donc un ange pour le guider. L'ange s'appella Michel. En voyant l'ange descendre vers lui, le Frère Delautre s'écria "quelle venne!" et c'est ainsi que depuis ce moment on le nomme l'ange Michel Quelvenne.
"Tu vas m'aider?" demanda le Frère.
"C'est mon Devoir!" répondit l'ange.
L'ange Quelvenne lui annonça alors que pour retrouver la souche il devait aller la chercher là où elle dormait d'un someil profond, c'est à dire dans l'ancien monde. Et que pour se protéger des créatures maléfiques qui le peuplaient et qui feraient tout pour ébranler sa foi au Dieu Civa, il devait faire ce périple sous la forme d'un chemin de croix Mont-Royal.
Seulement ainsi il pourra retrouver la souche et la rammener au peuple pour qu'il la jette au feu de la Saint-Jean pour qu'enfin l'ancien monde s'évapore avec ses créatures maléfiques et que puisse naître enfin le Nouveau Monde de Civa.
http://www.inm.qc.ca/pdf/cahierspecial2007.pdf
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