À mettre au dossier de la commission d'enquête sur les accommodements...
C'était dans les jours encore tout chauds de la défaite référendaire de 1995. On se rappellera que Jacques Parizeau venait d'abandonner son fauteuil rembourré au Parlement de Québec sur la fameuse question du « vote ethnique » (!), un fauteuil que Lucien Bouchard récupérait ainsi par la bande pour en faire son trône. Les arbres laissaient tomber leurs dernières feuilles d'un automne chaud. Le peuple se préparait à un long et dur hiver national. Les nationalistes n'en finissaient plus de s'auto-flageller sur la place publique et de promettre d'accommoder les nouveaux arrivants pour qu'ils s'y sentent bien.
Pendant que certains s'étendaient sur la planche à clous pour exorciser ce grand malaise, d'autres arrivaient avec leur bure et allumaient les braises qui allaient irradier de ce pire des mondes le nom même des Canadiens français, le socle séculaire sur lequel avait été construit pourtant le projet national. Dans la clameur, une tête émergea, pour dire notamment ce qui suit :
« Le nationalisme québécois serait condamnable s'il voulait imposer aux immigrants les coutumes ou la religion traditionnelles des Canadiens français. Il serait coupable s'il prétendait imposer aux immigrants certaines idéologies ou le programme d'un parti. [...] S'il faut parler de « nettoyage ethnique », comme l'ont fait récemment (et d'une manière totalement irresponsable) quelques éditoriaux en provenance du Canada anglophone, c'est bien plutôt celui que, depuis quelques décennies, les francophones québécois ont pratiqué sur leur propre culture afin de mettre en oeuvre un projet national qui soit le plus ouvert possible.
Mais il convient de le dire clairement aussi : tout ce travail d'adaptation et de renouvellement en profondeur n'est pas terminé. Le nouveau nationalisme québécois est encore en train de se faire et, chacun a pu le voir, tous les francophones ne suivent pas au même rythme. D'où la nécessité de marquer fortement la nouvelle tendance porteuse, déjà largement majoritaire, et d'accélérer sa promotion afin d'en détacher au plus vite les éléments dissidents et de clarifier les positions des uns et des autres. [...] Les efforts doivent maintenant se porter vers les deux défis les plus exaltants et les plus prometteurs du néo-nationalisme québécois : à) construire une identité nationale dans la diversité, b) assortir le projet national de contenus sociaux originaux. Faute de quoi, ce courant d'idées perdra beaucoup de son intérêt et plusieurs de ses supporteurs actuels s'en détourneront sans doute. »
Fin de l'épître et de la conclusion ! Et c'est signé : Gérard Bouchard, « Qu'est-ce qu'un nationalisme ethnique ? », in La Presse, 16 novembre 1995.
Onze ans plus tard, le résultat est criant, pathétique. L'élite « néo-nationaliste » québécoise s'est accrochée par la langue, par les pieds et par les mains à cette idée qui est devenue une sorte de dogme ; elle l'a soutenue de toutes ses fibres ; elle l'a défendue et enrichie sans s'inquiéter le moins du monde de la dérive et du tort irréparable qu'elle créait à sa propre cause ; et le Québec tout entier allait devoir vivre avec les conséquences désastreuses de cette mutation de l'identité nationale. Comme le gouvernement fédéral l'avait fait avec les Métis, en 1876, les Canadiens français passaient ainsi, par la main de leur propre élite et sans que personne ne s'en offusque ni inquiète le moins du monde, dans le chapitre des peuples fondateurs disparus sans laisser de traces. Hérouxville ne perdait rien pour attendre...
Akakia
Pendant que certains s'étendaient sur la planche à clous pour exorciser ce grand malaise, d'autres arrivaient avec leur bure et allumaient les braises qui allaient irradier de ce pire des mondes le nom même des Canadiens français, le socle séculaire sur lequel avait été construit pourtant le projet national. Dans la clameur, une tête émergea, pour dire notamment ce qui suit :
« Le nationalisme québécois serait condamnable s'il voulait imposer aux immigrants les coutumes ou la religion traditionnelles des Canadiens français. Il serait coupable s'il prétendait imposer aux immigrants certaines idéologies ou le programme d'un parti. [...] S'il faut parler de « nettoyage ethnique », comme l'ont fait récemment (et d'une manière totalement irresponsable) quelques éditoriaux en provenance du Canada anglophone, c'est bien plutôt celui que, depuis quelques décennies, les francophones québécois ont pratiqué sur leur propre culture afin de mettre en oeuvre un projet national qui soit le plus ouvert possible.
Mais il convient de le dire clairement aussi : tout ce travail d'adaptation et de renouvellement en profondeur n'est pas terminé. Le nouveau nationalisme québécois est encore en train de se faire et, chacun a pu le voir, tous les francophones ne suivent pas au même rythme. D'où la nécessité de marquer fortement la nouvelle tendance porteuse, déjà largement majoritaire, et d'accélérer sa promotion afin d'en détacher au plus vite les éléments dissidents et de clarifier les positions des uns et des autres. [...] Les efforts doivent maintenant se porter vers les deux défis les plus exaltants et les plus prometteurs du néo-nationalisme québécois : à) construire une identité nationale dans la diversité, b) assortir le projet national de contenus sociaux originaux. Faute de quoi, ce courant d'idées perdra beaucoup de son intérêt et plusieurs de ses supporteurs actuels s'en détourneront sans doute. »
Fin de l'épître et de la conclusion ! Et c'est signé : Gérard Bouchard, « Qu'est-ce qu'un nationalisme ethnique ? », in La Presse, 16 novembre 1995.
Onze ans plus tard, le résultat est criant, pathétique. L'élite « néo-nationaliste » québécoise s'est accrochée par la langue, par les pieds et par les mains à cette idée qui est devenue une sorte de dogme ; elle l'a soutenue de toutes ses fibres ; elle l'a défendue et enrichie sans s'inquiéter le moins du monde de la dérive et du tort irréparable qu'elle créait à sa propre cause ; et le Québec tout entier allait devoir vivre avec les conséquences désastreuses de cette mutation de l'identité nationale. Comme le gouvernement fédéral l'avait fait avec les Métis, en 1876, les Canadiens français passaient ainsi, par la main de leur propre élite et sans que personne ne s'en offusque ni inquiète le moins du monde, dans le chapitre des peuples fondateurs disparus sans laisser de traces. Hérouxville ne perdait rien pour attendre...
Akakia
3 Comments:
dit :
Faut-il penser qu'il y a une « main invisible » derrière toute cette affaire? J'en suis certaine...
Pouvons-nous croire que les deux Bouchard aient été des marionnettes consentantes aux mains des concepteurs du Plan B du gouvernement fédéral? Comment nos compatriotes du Saguenay-Lac-Saint-Jean, souverainistes et nationalistes parmi les plus souverainistes et nationalistes, ont-ils pu trahir à ce point? Étaient-ils si ambitieux qu'ils aient préféré trahir...Inquiétant que tout cela. Et l'un d'eux est président de cette commission bidon sur les accomodements raisonnables. Et l'autre, le Déserteur, n'a de cesse de nous donner des leçons de vie.
Faut-il croire que toute notre élite nationaliste (SSJB, SNQ, entres autres) s'est retrouvée à la marge,s'est contenté d'observer et finalement s'est tue comme des lâches pour ne pas dire autre chose?
Et par la suite, nous avons assisté au « tarabiscotage » de notre fête nationale. Savez-vous qu'il n'y a plus que les Canadiens français qui n'ont plus de fête nationale qui leur est dédiée. La « main invisible » s'est même appropriée notre fête comme cela s'est fait pour la feuille d'érable, le castor, l'hymne national et j'en passe. Il faut continuer de décerveler les Québécois et notre propre élite y a mis elle-même la main à la pâte.
Je me souviens très bien de cet après référendum de 1995 où toute notre élite et les mercenaires québécois se sont jetés sur Jacques Parizeau. Un peu comme on l'a fait dernièrement sur le conseiller Drouin, le conseil et la population de Hérouxville. Mais dans cas-ci, ils ont échoué. Le peuple québécois, de souche française à 80%, s'est prononcé et vigoureusement. Il n'entend plus se faire dépouiller davantage.
Je me souviens aussi avoir lu dans le Devoir, dans les années 95, une petite annonce qui parlait de Vigile, ce journal électronique, maintenant complètement récupéré par un certain pouvoir. Ce journal qui était un journal de combat, mais qui ne l'est plus. Que s'est-il passé????
Je me souviens m'être précipitée sur l'internet pour lire ce journal parce que je croyais que le combat pour notre indépendance avait totalement disparu du paysage québécois.
Je me souviens avoir constaté que des organismes dévoués à « la cause » étaient pour ainsi dire moribonds et de ce fait silencieux. À cette époque, j'en avais répertorié une trentaine, à ma grande joie. J'en attendais des miracles qui ne se sont jamais produits. Ils chantaient tous, à la suite de Gérard Bouchard et des mercenaires québécois, le refrain de la nation civique.
Mais quelle ne fut pas ma déception de constater que tout nationalisme avait été banni du discours souverainiste. J'ai bien écrit quelques tribunes libres sur Vigile pour dénoncer cette situation. Mais le silence était de mise. Ne réveillons pas le chat qui dort, disait-on. Ne nuisons pas à la cause, disait-on aussi.
Et par la suite, la « main invisible » s'est appliquée à entretenir les Québécois de multiculturalisme, d'interculturalisme, de santé, de faits plus divers les uns que les autres. À cette époque on commençait à faire l'éloge du bilinguisme qui, depuis, a presque été institutionnalisé par le PQ lui-même. Et ça continue de plus belle dans les médias.
Denise Bombardier, hier soir à TVA, s'inquiétait du niveau de cynisme des électeurs envers les politiciens, ces politiciens dont la plupart ont assassiné Jacques Parizeau en 1995 et qui s'est retrouvé complètement isolé. Ces même politiciens qui nous accusaient de racisme, d'antisémitisme, de xénophobie si on osait défendre M. Parizeau, défendant ainsi les véritables fondateurs de ce pays. Je trouve cela très significatif et très inquiétant.
Que dit-on et comment traite-t-on Mario Dumont qui a osé dire que le Québec n'était pas une page blanche où on pouvait y écrire n'importe quoi. Ils se sont tous jeté sur lui, comme on l'a fait pour J. Parizeau. Il a tous les défauts, entres autres, celui très odieux, de vouloir défendre les « de souche ».
La « main invisible » et ses suppôts sont démasqués.
Comment s'y prendra-t-elle pour convaincre les Québécois de poursuivre leur anéantissement, leur extermination sans dire un mot.
Je crois qu'il y a eu l'avant Hérouxville et qu'il y aura maintenant l'après Hérouxville. N'en déplaise à certains. Ces événements sont historiques.
Que peuvent-ils nous dire maintenant? Comment peuvent-ils nous convaincre de voter pour des troufions? Madame Bombardier a bien raison.
Le Québec est devenu le «Pays trahi», livre écrit par Russsel Bouchard et dont on s'est allègrement moqué.
Marie Mance Vallée
dit :
Vous avez bien raison de vous désoler. Pour Vigile, vous pouvez constater avec moi, jour après jour, qu'il ne fait plus que du copier-coller les articles de La Presse, du Soleil, et du Devoir. Il n'y a plus de dissidence. Ce journal est devenu le foure-tout de la médiocrité québécoise qui pense et parle au nom de la dissidence. Ce journal virtuel qui se présente sous l'étiquette alternative, est le plus réactionnaire de tous. Il n'a aucune ligne éditoriale si ce n'est celle d'opiner devant les commissions des autres.
Mais il y a un rendez-vous que ces gens ne pourront pas éviter ; celui de l'histoire qu'ils ont trahi. Ils ont en effet écrit abondamment ; ils ont parlé beaucoup ; ils ont semé la confusion et ils ont conséquemment laissé des cascades de traces et d'empreintes de leurs bêtises et compromissions.
Je suis à relire les textes publiés par G.B. et ses ouailles au cours des années 1990. Il ne m'en manque aucun, car j'avais déjà compris, à l'époque, le trajet qu'ils s'étaient donnés. Et si ce n'est pas notre époque qui fait ce constat, ce sera la prochaine ou la suivante. Mais cela se fera. C'est écrit...
Russel Bouchard
dit :
http://www.geocities.com/innocent.citron/padzouSCot.jpg
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